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Le train dans la neige roule vers Varsovie par Botticella

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Le train dans la neige roule vers Varsovie Sylvia a tout oublié Elle part rejoindre les ombres de sa vie Dans la nuit d’un hiver fou Le front appuyé contre la vitre Elle ne songe plus à rien Ses larmes sont taries depuis si longtemps Des souvenirs épars effleurent sa mémoire La lune éclaire à peine un ciel chargé d’épais nuages Tout est gris et obscur La brume entoure les choses les êtres et les lieux Existence dérisoire qu’elle n'appréhende déjà plus Le train roule très vite vers Varsovie Sylvia regarde les lumières troubles qui ça et là apparaissent Soudain elle aperçoit des paysages inconnus Un fleuve boueux Des toits des fenêtres des jardins Ce lointain diffus émerge de la terre qui par endroits fume de gel et de givre Un silence religieux enrobe le wagon Terne persistance d'un chaos qui devient délivrance La neige s'est remise à tomber en épais flocons Cette écume blanche dans la nuit ressemble à la pureté perdue Un monde vierge de maux Mais sans cette vie humaine éperdue de puissance Cet univers pourrait être le berceau de l'innocence première Sous les lueurs données par l’éclairage du train La vitre du compartiment est luisante de perles nacrées Pourtant Sylvia ne voit que des fantômes Des silhouettes spectrales défilent dans son esprit de sable Le réel devient flou Faisant place à un voyage étrange vers une autre entité Celle d'un monde invisible Des cauchemars l'assaillent Nausée d'acier qui enserre sa poitrine Respirer lui est devenu si difficile Les formes muettes défilent devant son regard vide Dans une absurdité qui la rend impassible Elle n’arrive plus à humecter ses yeux de sanglots Ceux qui avant l’inondaient constamment Son visage devient pâle Ses yeux bien trop bleus brillent si fort Vides des rêves perdus des frénésies déchues Sylvia ne cherche plus rien Ne sait plus rien Elle se sent happée par un gouffre de poussières rouges Dans ce désert sans fin l'inonde des vents violents Là se sont éteints les feux au crépuscule de la folie La nuit ronge ses songes anéantis Les paysages ont changé D'immenses forêts défilent Des prairies noires Des vallons des collines Des sources et des montagnes Le train dans la neige roule vers Varsovie Le sombre a recouvert son teint de porcelaine Ses cheveux clairs Et l’écho de sa voix Sylvia ne ressent plus rien Ni haine ni amour ni peur Elle est calme Sans frissons et sans astres Elle est blême Sans passion et sans fièvre Au fond de cette lourde obscurité Brûlures et cicatrices ont disparu soudain De son corps maladif De son cœur bohémien Elle est lisse et absoute de tout ce qui l’écorche Des mosaïques noires qui ont tué sa vie Elle a tout oublié Sylvia retourne à la source d’un monde inconnu Cet univers sauvage qui la reconnaîtra Au fond de ce rivage elle se voit sans mirage Sans présent sans futur Sans passé et sans routes Elle est loin des fontaines de jouvence qui l’ont toujours portée Loin des forêts et des eaux vives Loin du soleil aimant Loin de l’aurore pourprée Et surtout loin d’elle-même Le train dans la neige roule vers Varsovie Sylvia est dans l’oubli total Et son coma profond l’emmène au-delà des rives de lumière Aux frontières d'un enfer Qui ruisselle déjà sur ses paupières vermeilles Le train dans la neige s'est arrêté Sylvia regarde Varsovie Bien avant ce voyage où l'attend le vertige Elle a perdu son corps son coeur et son esprit Dans des bras disparus qui sont déjà si loin Elle ne frissonne plus Ni des voix ni des tombes ni de ces beautés chaudes des vastes espaces d'or Seul le temps impressionne sa chair bien trop douce Écorchée sur les roches tranchantes des aubes noires Dans le froid et la neige Sylvia avance en silence Varsovie est là et lui ouvre ses bras Varsovie devient son port Et dans cet océan de vies de souvenirs et de sang Elle vient chercher son âme engloutie sous les cendres … Botticella

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