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Ah, l'amour... toujours l'amour ! par The Dreamer

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Aujourd’hui, je vais vous parler de l’art d'Euterpe. Depuis mon plus jeune âge, mon oreille est familiarisée avec la musique classique et particulièrement la période baroque européenne. Celle-ci s'ouvre avec l'Orféo de Monteverdi et se clôt avec les oeuvres de Rameau et de Telemann. L’œuvre que je vais évoquer s’intitule Armide. L’intrigue se déroule aux confins de l’Orient. Armide est une magicienne, son oncle Hidraot est Roi de Damas. Lui aussi fabrique des potions maléfiques. Autant dire qu’il vaut mieux ne pas le chatouiller sous peine de mal finir. La période est trouble. Nous levons le rideau au moment où débute la première croisade. Bon, en gros vers la fin du 11e siècle. Ces expéditions «punitives», durant lesquelles les protagonistes infidèles de tous bords se trucidaient allégrement pour savoir qui posséderait la ville sainte : Jérusalem la bien nommée. Un point crucial à soulever dès le début. Le compositeur Jean-Baptiste Lully a choisi de truffer son opéra de personnages fictif, à l’exception de Godeffroy de Bouillon. Le livret s’appuie sur une oeuvre épique : «La Jérusalem délivrée» (des musulmans comme toujours), d'un écrivain italien Le Tasse (de son vrai nom Torquato Tasso). Pas franchement nouveau roman, mais oeuvre pleine de bruits et de fureur, d’hémoglobine, de sortilèges et de passion. La jeune et belle Armide, est chargée par son oncle de combattre l'armée de Godeffroy de Bouillon qui tente de conquérir Jérusalem. A l’aide de divers maléfices, elle tue, transforme ou emprisonne entre ses griffes d’infortunés croisés. Le plus valeureux d'entre eux Renaud, parvient à les libérer, puis s'endort d'un sommeil profond et magique. Armide furieuse profite de ce sommeil pour se venger de cet affront. Elle décide d'occire Renaud : «Enfin, il est en ma puissance, Ce fatal ennemi, ce superbe vainqueur, Le charme du sommeil, le livre à ma vengeance, Je vais percer son invincible coeur !» Il fallait au moins cela pour que son auguste majesté Louis XIV puisse s’intéresser et danser. Mme de Maintenon sera là à ses côtés dans le ballet des Plaisirs de l’Ile Enchantée. Reprenons l’intrigue. Au moment fatidique, alors que son poignard se lève pour porter le coup fatal son âme est touchée. Elle veut lui faire avaler un philtre d'amour pour s'attacher son affection. Le temps passe et Armide sait que même si Renaud est son amant, elle ne pourra pas plus longtemps le garder. Comme dans tout opéra qui se respecte, arrive un moment où ça se corse. Armide veut lutter contre cet amour et fait appel à la Haine afin de le détruire. Au même instant, les potes encapuchonnés de Renaud voulant le récupérer, partent à sa recherche avec un bouclier magique destiné à rompre les charmes dans lesquels la Belle Armide tient son amant en son pouvoir. Abrégeons. Ils parviennent à le délivrer. Armide se réveillant d'un songe, voit son amant partir au loin. Par dépit amoureux, elle ordonne que l'on dévaste son palais pendant qu'elle s'envole sur un char. Fin. Le livret de l’opéra est écrit par Philippe Quinault en 1686. L’oeuvre est montée à peine un an avant la mort de Lully. Durant la direction de «La marche pour la cérémonie du Turc» - Comment vous expliquez : vous savez dans «Tous les matins du Monde» lorsque notre Depardieu national dirige un orchestre avec une canne pommeau - Vous voyez cette scène ! la musique qui l'accompagne c'est celle-ci : http://minilien.fr/a0lbvj Morceau écrit pour sa royale majesté qui commençait à s’ennuyer ferme en son château et devait recevoir un ambassadeur de Perse, qui s'est avéré en fait n'être qu'un simple plénipotentiaire, ce qui soit dit en passant rendit Louis vert de rage. Pendant que Jean-Baptiste avec Monsieur (Philippe d’Orléans, frère du roi), s'occupaient à lutiner les jeunes pages dans les couloirs de Versailles (ce qui arriva aux oreilles du roi qui en représailles bouda tout de go Armide). Y a quand même des coups de pied au cul royal qui se perdent ! Le grand homme se donna un coup de canne qui six semaines plus tard, manque d'hygiène et gangrène aidant devait le conduire à la mort. Au grand plaisir de nombreux artistes, que le compositeur avait piétiné, aux premiers rangs desquels, Molière et Charpentier. Concluons en disant qu’Armide c’est beau. Mais, pourquoi est-ce beau ? Comment est-ce beau ? Où est-ce beau ? A quelle heure est-ce beau ? C’est difficile à dire. C'est beau comme un coucher de soleil, comme le vent dans les arbres, comme si les nuages d'un seul coup s'ouvraient et que quelqu'un d'en haut nous disait : «Heureux mortels, écoutez donc !» : «Les plaisirs ont choisi pour asile, Ce séjour agréable et tranquille, Que ces lieux sont charmants pour les heureux amants (bis). C'est l'amour qui retient dans ses chaînes, Mille oiseaux qu'en nos bois nuits et jours on entend, Si l'amour ne causait que des peines, Les oiseaux amoureux ne chanteraient pas tant. Jeunes coeurs tout vous est favorable, Profitez d'un bonheur peu durable, Dans l'hiver de nos ans, l'amour ne règne plus, Les beaux jours que l'on perd sont pour jamais perdus". (1) Ces quelques lignes écrites par Quinault constituent l’une des plus belles, une des plus puissantes, une des plus bouleversantes pages de la musique baroque. Œuvre magistrale du premier compositeur français qui en fait était italien. Pendant 13 minutes on ressent intensément l'émotivité instrumentale de Lully. Armide est un opéra réaliste où la musique montre l'impuissance de la magicienne, dont les charmes n'empêchent pas que parte à la fin de l’œuvre dans un déluge de feu, l'être aimé. Un intense moment de bonheur musical. Une musique céleste, testament de Lully puisqu' Armide fut son oeuvre ultime. (1) Passacaille d'Armide - 1686 – Jean Baptiste Lully sur un livret de Philippe QUINAULT. Paroles de Philippe Quinault, musique de Jean-Baptiste Lully - Compositeur attitré et autoproclamé seul à pouvoir satisfaire les désirs de sa royale majesté Louis le quatorzième. Dommage pour les autres qui jamais n’atteindront ne serait-ce que les grilles du château.

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