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LAME DE METRO par Fosterwelles

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Partir ! …je veux fuir ! Vite !!! Il s'est passé des désastres d'une ville à l'autre. Leurs champs de batailles furent, sont et seront témoins des pages en nuances des évènements et de la syntaxe maladroite, chorégraphie du coeur des hommes. Pourtant, nulle cité ne se compare à Paris. Il y règne une folie toute aussi coutumière du malheur d'un Sartoris que de celui d'un Rougon-Macquart. A Paris, j'ai vu l'horreur, sans aucun doute plus infernal et fatal qu'un charnier anonyme criblant un Kosovo. Je parle de cette sorte d'apocalypse, dans lequel tout être humain trouverait sa loi, par l’incomparable logique d’un mal « égoïstique » dont il se baise en religion. Entre la gare de l’Est et la porte d’Orléans, une femme perdue entre les entrailles d’acier froid d’un métro sans âme laissait suer sa misère, arguant bruyamment que tout le monde avait à connaître sa galère ! …elle, elle ne demandait guère qu’une piécette ridicule : cette arme qu’il nous aurait été si facile d’imager « fleur » en la lui offrant avec sourire. Une piécette, grenade maléfique qu’il nous fut si normal de maintenir en poche ! Cette espèce de sorte de truc de misère qui nous devrait être si intolérable à supporter du regard, la voilà en gris allégé de notre commune réalité. Les gens ont tant crié, tant mouillé leur visage gris de larmes de cristal, tant haï, tant joui… et cela ne nous étonne plus, non, plus du tout, pas moi, pas toi, tout cela ne nous blesse plus…. du tout. Il y a quelque chose de pourri dans l’un des royaumes de Willy, quelques choses… Un royaume qui n’est autre qu’un versant obscure, triste de notre âme socialisée. Il y a quelque chose d’insensé dans tout cela. Quelques minutes avant, un autre homme, constitué de la même chaire que cette femme, lui aussi lâché sans préparation au monde, voulait se battre, il portait cette vieille chemise bleue auréolée par la mécanique dégénérée de son travail ; oui, il cherchait querelle avec un autre qu’il appelait son ego sans alter. Cet homme, lui, voulait du sang, des coups, de la haine, son propre dégoût – ce juste reflet des provocations de ces histoires, lâchetés et autres frustrations liées aux évènements et à ces angoisses parfois même entremêlées. Peut-on m’expliquer pourquoi cela ? Le peut-on, je crains que non, je crains que cela soit irraisonnable. Je crains que nous la nommions « société ». J’ai vu la misère… il me semble aimer Paris, pour toujours humaine. Plus tard, quittant le ventre aseptisé de la gare Montparnasse, j’ai vu en écrivant ces lignes désabusées, la lune d’une blancheur extrême posée sur son papier de nuit. J’éprouvais de la joie, sa pâleur triste ramenait quelques fumigènes rayonnant de poésie… Là-haut, reine de la nuit, je vois la Lune, déjà je l’aime… Pourtant,elle, elle me quittera au matin son amant toujours maléfique qui la glace de peur. Petite femme soumise à sa stupeur d’esclave… Et je haïssais le jour comme on abord ces cornes qui vous griffe la fierté que femmes et hommes nous font lourdement porter aidées de leur bienheureux et imbéciles maquereaux de passage. … Je jouis de malchance, mon téléphone qui depuis la veille venait de recouvrer ses divines fonctions vitales m’a été volé par un pauvre minable qui mourra à trente pige d’une balle ou de la lame de ce cutter qu’il me mit sous la gorge, peut-être même dans ce même couloir de métro, ici. Pourquoi n’ai-je ressenti aucune peur ? Pourquoi à cet instant unique, une mystérieuse lueur apaisante jaillit du métro-tunnel dans l’intestin duquel je glissais. Aurais-je souhaité que cette lame bon marché et sans aucun artisanat embrassa ma carotide dans une longue caresse de fou, là comme ça, doucement de la gauche vers la droite, puis d’un coup sec en guise de conclusion, finissant par m’abandonner alors à ma chaleur la plus intense, au rouge le plus pur, le plus évident, mon Rouge-Vie ! …à cette unique vérité vers laquelle l’on tend de toutes heures. Je m’en vais et j’aimerai dire à jamais de Caen. Il me faudrait le courage du conquérant, ce courage qui fit des hommes des êtres magnifiques d’exception. Oui, le courage… Je suis là. Toujours… immobile. Paris, 26 juillet 2011

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