Dédé lembrouille était un type pas catholique. Cest pas lintegrité qui letouffait. Nempêche , il fut enterré religieusement dans son village, en Corse,à Corbara.
La ceremonie eu lieue en leglise du couvent, tres jolie dailleurs. Cétait par une belle journée dautomne, comme on en trouve dans cette île meridionnale, où lété joue les prolongations. On était pas nombreux à etre venu du continent. Javais pris sur mes congés pour dire adieu à ce vieux baltringue. Parce quil faut dire que ma hierarchie au quai des orfevres, voyait plutôt dun mauvais il ma presence ici.On eu droit aux pleureuses, au chants, à tout le tsoin tsoin. Cétait marrant, on aurait put croire que cétait un honnête homme , en voyant ses obseques.
Les morts sont toujours des braves types.
On plaça Dédé Guidicelli (prononcer gouidichell') dans le caveau familial ,sur les coteaux, face à la mer. Je me sentai bien, loin de mon travail darcher. Jallumai une cibiche, juste à la fin , quand tous les « acteurs » seloignerent. Je dis les acteurs, car cétait une sacré comedie que cet enterrement, demain ils iraient pleurer un autre mort, en oubliant celui-ci. Restait plus quà me faire ramener au bateau par loncle de Dédé et à rejoindre Marseille, puis Paris.
Marseille, cest là quavait vecu ce margoulin. Son daron avait migré comme beaucoup de corses, fuyant la misere,puis la grande guerre lavait pris. A 14 ans , Dédé affurait de largent pour sa maternelle et ses frangines. Seul garçon au milieu de 5 filles, cétait une sacré responsabilité. Il avait rencontré les freres Guerini, de balagne eu aussi. Dédé était devenu rapidement leur homme de main.
On sétait connu sur une affaire de prostitution à Paris. Jetais jeune condé, tout frais moulu de lecole, cétait dans les années 20. Et depuis , plusieurs affaires nous avaient reuni. On était des collegues de travail en quelque sorte.
Dédé affectionnait trop le grisbi , cétait son talon dachille comme on dit. Faut que je mette des jolis mots dans ce recit, ma femme me reproche davoir un langage trop familier.Si elle croit quon se fait comprendre des gonzes quon alpague avec des alexandrins, elle se fourre le doigt dans lil.
Revenons à notre Dédé lembrouille, surnom qui lui allait comme un gant. Rapport à ce quil avait le genie pour se foutre dans des merdes, heu pardon, dans des situations incroyables. Il avait des roubignoles, ça cest sur mais de la cervelle, pas lombre.
Tant quil commerçait avec les Guerini, ça allait, ecremeuses,clandé, alcool frelaté, rien de bien extraordinaire. Là où il a merdé, ce guignol cest quil a fricoté avec des tarrés de lOAS, un trafic de soufflants et des braquages. Jy avais dit lors dune garde à vue, je lavais prevenu . « Cest pas du grain pour ton bec, lOAS » que je lui avais dit.
Mais , ce genre de gars nen faisait quà sa tête. Ce commerce interlope était risqué. Avec toutes ces combines et magouilles,Dédé avait amassé un joli pactole. Il avait investi dans un bistrot du coté de la belle de mai. Il y avait placé une frangine, tirée du trottoir. Elle avait un marmot.
Dédé, cétait un grand bonhomme, en bon mediterranéen, la famille sétait sacré. Arrivé à la quarantaine, ilse sentait lâme paternaliste. Il avait donc decidé dadopter le lardon, » en bon uniforme », quy disait. Pour une fois quil faisait dans la legalité
Je laidais dans cette demarche. Mais la DDASS naimait pas cette idée.Quand jy pense, je me marre.
Bref, pour ce minot, Dédé transformait son turbin en activité legale. Bistrot, compte depargne, un ou deux appart à louer. Ce gamin metamorphosait lhomme. Comme Dédé n'etait qu'un salaud, il se fit honnête.
Dédé l'embrouille devenait monsieur Guidicelli et ainsi seloignait de ses anciennes frequentations. Le dimanche, on le voyait se promener avec simone et le lardon.
Cest dailleurs un dimanche quils lont buté. A la sortie de la messe. Heureusement que sa bergere et le môme était encore dans leglise, à parler communion avec labbé. Criblé de balles sur le parvis, un boulot de boucher. Beurk. Cest moi qui les ai coffrés. Des anciens paras, membres de lOAS. On leur a pas fait de cadeau, on leur a meme collé, en loucedé, une histoire de chnouf.
Je lui avait dit à cet empafé
quel con ce Dédé.
Du coup , les demarches dadoption furent interrompues. Le gosse, il ne lui restait plus quà dire adieu à lheritage .
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