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Phosphène et acouphène sont sur un bateau... par Broglancien

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Non ! Vingt-cinq centimètres, ce n’est pas ce que beaucoup commencent à s’imaginer compte tenu du style auquel nous avait habitués Manon, la belle rousse à la carnation laiteuse. Non, ce n’est pas non plus la longueur de la lame du surin qu’on aurait retrouvé entre les cotes de Dédé au matin qui suivit sa dernière visite à Manon, sa dernière étreinte. Ça n’était d’ailleurs pas un surin mais un rasoir du type des coupe-choux dont se servait Le Tiffain pour rafraîchir la nuque des habitués de la coupe « bien dégagée derrière les oreilles ». Et le rasoir, il traînait dans le caniveau, à un bon mètre du Dédé… à qui une bonne âme avait rajouté un deuxième sourire, sous le menton, celui-là. Non, 25 cm, c’est juste l’épaisseur du dossier qu’avaient constitué les sbires du juge d’instruction. Car ce ne sont pas les pistes qui manquaient, on connaissait Dédé de longue date dans les couloirs du Palais de Justice de Béziers-sur-Orb, d’autant que la Mondaine avait, fait exceptionnel, apporté sa pierre à l’édifice, et ladite pierre n’avait rien d’un gravier ! Un pavé plutôt ! Mais la crim avait eu beau farfouiller dans le matériau pourtant riche qui leur avait été confié, leur pinaillage poussé n’avait levé aucun lièvre, aucun indice. La police enquêta dans tous les bouges interlopes où Dédé sévissait. Les barmen, les serveuses, quelques-uns de ses camarades de tiercé, Même ses gagneuses favorites avaient été mises sur la sellette : - Mado, on sait qu’il te flanquait des baffes le Dédé, t’en as eu marre, en plus ton fric il le craquait avec Manon, t’as pas supporté, crache le morceau ! - Déconne pas poulet, on est à la colle depuis bientôt 10 ans Macouille et moi, et ça dure depuis le début, son histoire avec Manon, alors pourquoi j’aurais pété les plombs d’un seul coup ! - Ben tu vas nous le dire ! Dit-il en lui braquant son vieux projecteur dans la figure, sinon, on te laisse aux mains de la mondaine, histoire de... - Faites pas ça, dit-elle clignant des yeux, des phosphènes en balade dans les mirettes, je demande pas mieux que de l’ouvrir… Mais je sais rien… Vous pouvez demander à Olga ! Ça ne donna rien de plus avec Olga (Odette Pluche dans le civil) : - Je peux rien vous dire Monsieur le Commissaire, je sais rien (elle avait toujours gardé le respect de la hiérarchie policière), mais à la télé, les flics… je veux dire les policiers, y se demandent toujours à qui profite le crime ! … - Mais c’est qu’elle nous apprendrait notre boulot, cette conasse ! Je vais t’apprendre … Et Il leva la main, menaçant.. - Ecoutez, Monsieur le Commissaire, ce n’est pas la bravoure qui me manque, mais… - Bravitude, c’est bravitude qu’on dit, et d’abord, je ne suis pas commissaire ! - … Mais évitez le visage, à cause de la clientèle, ça la fout mal ! Et puis qu’est-ce qu’elle en dit, Manon ? … - Et arrête de m’interboliser ! - Hein ? ….Comment ? - Ah ah ah ! ! ! Tu fais moins la fière, hein. La commissaire aussi quand elle dit ça aux suspects, ça leur coupe la chique ! … Alors tu connais Manon, toi aussi ? - Ben on a commencé ensemble Manon, Mado et moi, alors… Le flic de service compris qu’il n’arriverait à rien, mais laissa quand même partir sa paluche… Et pour Olga, ce furent des acouphènes qui lui sifflèrent pendant une heure dans les oreilles… La piste « professionnelle », si l’on peut dire ne donnait rien ! Il restait encore deux trois points à vérifier sur l’axe « privé ». La commissaire Flatfoot se rendit dans la boutique du Tiffain où Manon tenait exceptionnellement la caisse. Après tout, la jalousie pouvait être encore une fois le mobile. Elle reprit l’interrogatoire de Manon dans un coin, demandant à l’adolescent boutonneux en blouse de cosmonaute qui faisait le ménage de s’éloigner un peu. - Est-il vrai que vous aviez des… faveurs pour Dédé. - Ben si vous voulez, mais c’était pas bien méchant. Je le voyais de temps en temps… Il était hanté par ma ch… petite culotte et il passait parfois m’en essay… offrir une… - Il est passé chez vous la veille de sa mort ? - Je… Oh! et puis zut, oui, mais je vous assure qu’il était bien vivant quand il a regagné ses pénates, fatigué, mais vivant… et … - Et ? … - Et rien ! - Et votre mari, il en pensait quoi ? - Il a jamais rien su ni vu et lui s’intéresse plus à nos arpettes qu’à moi… Et d’ailleurs, je tire régulièrement les cartes à des paumés qui voudraient voir leur ciel plus bleu. Ça me laisse de la liberté. - Ah bon ? C’est comme ça que vous appelez ça ? Tirer les cartes ? Et depuis quand vous faites dans l’occultisme ? - Les gens aiment ça… ça a commencé quand je voulais calmer les ardeurs de Dédé, et j’ai trouvé ça marrant, et ça le faisait rire le Dédé… Il disait même qu’il aimait bien avoir une main occulte… Manon écrasa une larme… Un bruit de chaise poussée et de gamelle qu’on bouge, fit tourner la tête à la commissaire. Tout en louchant vers les deux femmes, l’ado était en train de transvaser lentement le contenu de la corbeille du salon dans un sac poubelle : un amalgame de poils, de cheveux et de saletés diverses. La commissaire vit en un éclair sur un carton que jetait Nicolas, l’image d’un rasoir à manche… Elle arrêta d’un geste l’ado, récupéra le carton… Un emballage de rasoir… Le Tiffain revenait sur le devant de la scène. La fliquette le fit « convoquer » au commissariat et on lui fit le grand jeu…Et Le Tiffain craqua : - J’avoue… Au moment où j’ai quitté Nic… heu la boutique, je terminais mes comptes, j’ai rencontré Dédé, il m’a traité de lopette, de merlan frit… Merlan, je veux bien, mais frit ! quand même !…, je lui ai fichu mon poing dans la gueule, il est tombé KO sur la route, la gueule dans le caniveau. Et je me suis sauvé avant qu’il se relève… - Et t’as profité de ce qu’il était dans le cirage pour le trancher. - J’étais déjà tout fier de lui avoir mis une branlée à ce mac ! Je suis pas un nihiliste, moi, j’aime bien les gens, et ça, je pourrais pas ! … - Alors pourquoi t’as racheté un rasoir, si c’est pas pour remplacer celui que tu as laissé sur les lieux du crime ? - C’est quoi c’t’histoire ! Des rasoirs j’en ai tout un stock, je peux pas me permettre de tomber en panne d’outil, je suis un coiffeur sérieux, je vois pas pourquoi j’en aurais racheté. - Allez, ton compte est bon. Embarquez-moi ça,… - Mais vous vous trompez, jamais je ne pourrais faire ça ! Vous vous rendez compte, un rasoir ! C’est horrible ! Flatfoot s’épongea le front, s’assit dans son fauteuil fatigué, et au moment où ses hommes franchissaient la porte avec le coiffeur, leva la main et dit : - Attendez ! … Dis-moi Tiffain, c’est qui cette Nic ? - … - Me prends pas pour une conne, quand tu m’as dit que tu finissais tes comptes, tu as parlé d’une Nic ! - … - Ramenez-le… Alors ? - ………Ben….... c’est pas une femme, c’est Nicolas, notre « femme » de ménage. Enfin, le garçon qui range et qui nettoie. - Raconte-moi ça ! Et pas fier de lui, Le Tiffain raconta … l’embauche de Nicolas, sa délicatesse, la douceur de sa peau, mais aussi ses regards en coin sur le décolleté de Manon, le chantage au chômage qu’il avait dû lui faire, leurs disputes… Et leur rupture ce soir là… - Mettez le au frais, et allez me chercher Nicolas ! L’affaire fut rondement menée. L’ado s’effondra à la première main levée. Il était encore sous le coup de la dispute avec Tiffain quand il entendit l’échange entre Dédé et Tiffain. C’est quand il vit Dédé KO dans le caniveau qu’il comprit qu’il tenait l’occasion du siècle : se débarrasser d’un seul coup de ce salaud de Dédé qui faisait régulièrement « chanter » Manon, et du Tiffain qu’il pouvait envoyer aux assises sans risque. … Mais soucieux de la qualité de son travail, il avait cru malin de remplacer le rasoir manquant par un neuf… Il avait juste oublié de jeter l’emballage… Ah ! C'est qu'elles voient si bien, les femmes, en une seconde, la chose qu'on n'aurait pas dû laisser traîner !.... Et le commissaire était une femme ! Broglancien 11/02/12

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