Ce dimanche là, à 7 heures du matin, Paris était déjà sous la neige, J'adore ce silence apocalyptique, où le moindre de nos pas est un évènement en soi, l'impression d'être un esquimau à la recherche d'un phoque égaré.
Mon colocataire entre brusquement alors dans le studio.
il dit 'Jimmy je te présente Jenny et Jessica'. Entre deux bouffées de Nirvana Special, je sors 'nice to meet yoooouuu'
"L'esclavage, c'est la liberté."
Klod me regarde. Je soutiens son regard. Je me retourne. La cible de fléchettes au dessus du frigo. Il gueule 'allez on fait une partie, on commence par un 501 double'. 56 parties et 8 packs de Kro plus tard. Klod dit élégamment 'ben les filles, les fléchettes c'est pas vraiment ça, j'espère qu'au lit, vous vous en sortez mieux !!'
Moi, le roi de la répartie, je cherche en vain une vanne irrésistible dans mon cerveau saturé d'éthanol et de THC. Ma bouche finit par sortir un imprévisible Hi Hi pour finir par un Hé hé, tout aussi inattendu.
Jenny se tourne vers moi et me balance l'intégralité d'une canette dans la figure, "bande de porcs mal dégrossis, vous pensiez pas qu'on allait coucher avec des pauv' types comme vous' dit Jessica en claquant la porte dans un français parfaitement fluently.
"La guerre c'est la paix."
Je sors la langue pour récupérer chaque goutte de la boisson alcoolisée, qui coule délicatement sur mon visage. Les yeux rouges, et les cheveux en pétard, je prend conscience de nos existences de minables. Intouchables n'est pas vraiment le mot. Irrécupérables plutôt.
Sur le vieux baril de lessive Ariel faisant office de table basse, trône encore une part de space cake au chocolat. Klod me regarde. Je soutiens son regard.
Je plonge en même temps que lui. Nos têtes respectives font bing (ou bang je ne me rappelle plus bien) puis le trou noir.
Une sonnerie me réveille.
La voix de Lana me fait surgir des limbes (pas celles du Pacifique). Elle m'explique que Call of duty, c'est lassant au bout d'un moment. Elle a bien raison malgré ses lèvres hypersiliconées.
Je vois apparaître sur mon Iphone, le visage de Marie, la bibliothécaire. J'éteins l'appareil.
"L'ignorance, c'est la force".
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