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"Ecrire"........... Le maître et le cancre par Abicyclette

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Il fait presque frais mais très beau, et mine de rien mine de plomb me voici tout à la joie de dominer d’un chemin tracé en surplomb l’heureuse et grouillante masse parisienne des bons jours. Il fait presque doux, il fait bien beau. Me voici au parc pour écrire, et rien d’autre ; et, peu philantrope, d’abord trouver un endroit où personne ne viendra m’emmerder, à l’écart, en bordure d’ombre, quitte à partir lorsqu’elle viendra me lécher les pieds... Alors je bougerai. Et je dépose là mes défenses ; et je suis là au pied d’un grand orme ; et là je resterai avant que l’ombre ne me chasse pour... «…de toutes mes armures délestées sous le gros essaim d’oiseaux - étincelles à pépies - fragile boule d’infusion aux sources cachées » appoltronner mes habitudes et commencer à noter la... «...respiration de mes molécules à la vastitude des mondes, le mascaret des grains de temps et la dispersion de molles langueurs vers d’insouciants ballotements sans qu’il soit même nécessaire de renouveler le ressac de leurs vaguelettes à ma conscience. » Voilà… Satisfecit : ça commence bien… un enfant bien élevé ne rote pas la bouche pleine et sans cracher trop de postillons j’ai mâché les mots, la saveur des sons, la saveur des sens… le style est un peu ampoulé certes mais de fidèle restitution quant à mes nouvelles capacités d’abandon aux souffles d’une vie si simple, si pleine, si organique… C’est mon chemin …Ce n’est rien…et tout ça pourtant… Mais déjà l’ombre des grands arbres a mangé un bon quart des pelouses. A cette place choisie pour que personne ne vienne me les briser, mine de rien mine de plomb, j’ai donc écroulé mes remparts et il faut incontinent écrire et réécrire mieux encore cette « …éclosion d’un printemps d’homme cicatrisant à la joie d’odeurs végétales données ca et là ses peu profondes cicatrices, maigres ou furtives angoisses des matins aboutis sitôt nés, absurdes défaillances vers ce qui n’est pas, n’existe pas et ne sera peut-être jamais, sinon un leurre, une trappe, une s…» Mais déjà je frissonne. L’ombre a déployé un immense tapis d’écorce sur les régions amènes et je suis ici noirci jusqu’à la taille. Il faut que j’amorce un nécessaire repli vers des grappes qui se sont mues en zone centrale, gens des dimanches se dorant ardemment la couenne. Et par sécurité, sait-on jamais, reprendre quelques morceaux de ma cuirasse. Ce sera donc ici au milieu de rien et de tous mais à la chaleur des rayons et des haleines que je poursuivrai mes bienfaisants gribouillis, parmi ces inconnus, les endormis, les lecteurs, les glandus, les qui se bécotent, les qui rigolent et les insupportables gratteux. « …quoiqu’il me faudrait encore finir des espoirs chavirés et saumâtres attentes que vi… » Non, ça ne va plus. Mes défenses sont recloutées à toutes mes jointures, je n’arriverai plus à rien. Je range mine de rien ma mine de plomb et m’accrocherai désormais à d’incongrus visages incompréhensiblement humains, loin au-delà du bout de ma lorgnette. On se serre, on se supporte. Le domaine du sourire a considérablement réduit et maintenant les plaques dévastatrices nous cernent : je reconnais la progression inexorable des mondes cacochymes. Car il faut bien qu’une journée comme un spectacle finisse. Et lors, à tour de rôle, certains stoïques Giacometti se lèvent très lentement, et très lentement quittent la chaleur de la pelouse pour se jeter très lentement dans les territoires de l’ombre et de l’oubli, résignés à l’échafaud - soleils cous coupés - traversant la frontière. Et aussi d’autres symptômes terribles : l’infection qui se propage à la surface même du corps des rescapés : les assis projetant leur lèpre noire sur les allongés. « J’ai peur de ça : Etalez-vous ! Etalez-vous… Je voudrais juste me chauffer encore, rester dans la lumière… Quand cette triste mascarade va-t-elle se terminer ? » Et pourquoi me mettre à sangloter ? Parce que tout va très vite, plus que quelques mètres carrés habitables déclinants à vue. Et je suis enfin seul. Est-ce cela que je voulais ? Ne plus bouger ne plus respirer, en ma camisole tenir sur ce radeau de la méduse en attendant que tout sombre, s’engloutisse ? Le compte à rebours va commencer : 5…………… 4………… 3…… 2… 1 Immersion totale : L’Effroi ………………………………………………………………………………La Joie Vivant ! Je suis là ! Vivant à moi-même ! Amis, Amis ! Ohé !…. revenez ! On nous a menti !... La mort n’existe pas !... Amis c’est un jeu, un leurre, une grosse guignolade ! Je l’ai expérimenté pour tous : nous sommes éternels ! Oui, je me lève et oui je danse, danse de terre, danse du vent, danse des plaisirs et de la chair, danse aux étoiles qui viendront, danse tarahumaha de la saint-guy… Oui je danse et je rugis au feu, au bronze, au fer, à l’écrit et aux humanités, à Paris qui se déroule sous les Buttes-Chaumont et qui ne finit jamais. Mais je décèle alors la domination d’une ombre plus profonde encore qui vibre aux confins et s’approche sans heurt et sans reproche, d’un pas lourd, d’une vibration sourde, dessin imprécis, masse grise dont les contours se solidifient ; et elle s’apprête et elle s’approche ; et je reconnais à sa casquette un impitoyable juge sans accusation, colossale statue de Commandeur à tête de gardien municipal, soldatesque de mes tout petits enfers : « Monsieur, c’est l’heure.» (pour tché et coucou, mes marraines en écriture)

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