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Masaï (3) par Lechainonmanquant

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Dans la rift valley qui s'étend sur 3000 kilomètres, l'histoire géologique a creusé son sillon laissant une empreinte indélébile dans le sol de l’Afrique de l'est. Du mont Kenya jusqu'au Kilimandjaro s'étendent de fertiles plaines dont celle du Tsavo qui a vu le début des premiers pas de l'australopithèque. Dans leurs croyances les tribus kikuyu et Masai s'y disputent leurs origines et leurs appartenances, ils ont gravé en leur mémoire la légende des anciens guerriers. Le Tsavo abrite une faune très riche et représentative de la vie sauvage, il y vit une variété de lions sans crinière et de taille supérieure aux races courantes, qui ont acquis la réputation de mangeurs d'homme. A l'âge d'or des colonies esclavagistes le Tsavo était traversé pour transporter le bois d'ébène jusqu'à Mombasa ou Zanzibar. Régulièrement les esclaves malades ou blessés ayant perdus leur valeur marchande ou retardant la caravane étaient abandonnés dans la savane assurant ainsi le garde manger des lions sans crinières qui s'habituèrent au goût doucereux de la chair humaine. La puissance coloniale est à son apogée, les anglais ont pris l'ascendance sur les allemands et règnent en maître dans cette partie de l'Afrique. Afin d'assurer la croissance de son économie et de déployer ses forces armées, en 1896 la British East Africa Company entreprend la construction d'une ligne de chemin de fer pour relier le lac Victoria et l'océan indien à Mombasa. La traversée de la faille et de ses infractuosités nécessita la construction de nombreux ouvrages d'arts pour franchir et aplanir le trajet du fer, plus de 20000 coolies indiens vinrent palier à la pénurie de la main d'oeuvre locale. Les contremaîtres furent rapidement débordés dans les premiers mois du chantier, la main d'oeuvre n'était pas suffisamment qualifiée et subit une épidémie de la maladie du sommeil provoquée pas la mouche Tsé Tsé qui foisonnait dans cette région. Il y eut bien sûr le paludisme et de nombreux accidents provoquant de graves blessures. Les moyens octroyés pour l'infirmerie de campagne ne pouvaient permettre de traiter tous les patients et encore moins les maintenir sous surveillance. Les demandes de renfort avaient été transmises, et ceux ci mettraient plusieurs semaines pour être réunis et acheminés sur les zones de la construction du chemin de fer. Quatre années auparavant, avec la colonisation et l'apport de bétail domestique, la peste bovine avait frappé la faune sauvage et décimé de grands troupeaux de zèbres et de gnous rendant la vie des félins plus difficile qui entreprirent de diversifier leurs proies pour assurer leur survie. L'odeur mêlée de sueur, de sang, de gangrène et de peur attira les grands félins qui savaient être charognards dans la nécessité. Les attaques furent nombreuses d'abord la nuit, puis en l'absence de toute résistance, il n'était pas rare que quelques lions fassent irruption de jour et viennent attraper et tirer les malades sans défense pour les emporter dans leur tanière. La malédiction qui semblait s'abattre sur les travailleurs du chantier nourrit l'imaginaire des croyances tribales et John Henry Patterson officier de l'armée britannique qui était chargé du commandement et de la sécurité du chantier dû prendre en charge personnellement la chasse de deux bêtes qu'il suspectait d'être responsables du plus grand nombre des attaques. La légende des bêtes du Tsavo était née, on ne saura jamais qui de l'homme ou des félins fit rentrer l'autre dans la prospérité. John Henry Patterson recruta des Masais pour l'aider à assurer la protection des camps et mener la chasse dans la savane. Les tribus Masais qui s'étaient opposées et avaient résisté aux invasions des colons, n'étaient pas présentes parmi les ouvriers du chantier. Leurs connaissances de la brousse et de la vie parmi la faune sauvage se révélaient essentielles pour l'officier de sa majesté. Les protections naturelles construites à partir de la végétation furent renforcées et rendues fiables. Kainé s'était joint à ses frères de sang , sa réputation de tueur de lion ne cessait de grandir depuis son premier, tué lors de son cycle initiatique. Dès lors il n'était pas rentré au village natal et avait poursuivi sa route livrant combat sur combat et vivant de mendicité. Le premier lion fût tué dans la nuit du 9 décembre 1898, la balle atteint la bête après le coup mortel de la lance qui se planta dans le poitrail de l'animal. Le 28 décembre la veille de l'abattage du deuxième félin, Kainé avait retrouvé sa piste et débusqué sous un arbre à saucisses. Le reste du groupe des chasseurs était en arrière et trop loin pour pouvoir tirer. Le Masai arc bouté sur ses jambes tenant fermement son bouclier dirigé vers l'animal avait armé sa lance en arrière de son épaule et attendait l'attaque imminente. Il ne se passait rien, yeux dans les yeux les deux protagonistes refusèrent le combat. Kainé recula de quelques pas ne quittant pas des yeux son adversaire qui s'esquiva sur un côté. Rejoint par le groupe, à sa tête, l'officier gromelait et rageait de voir disparaître sa proie. Sans se retourner Kainé reprit la piste mais à l'opposé de celle prise par le lion. Sous les injonctions de l'officier qui le sommait de s'arrêter il continua sa marche, il entendit le bruit de la culasse reculer qui insérait la cartouche dans la chambre, mais la légende Masai de Kainé le tueur de lion était en marche, le coup partit en l'air. Jonh Henry Patterson tua le deuxième lion le lendemain matin et entra dans la légende occidentale. La légende Masai dit que Kainé continua sa route jusqu'aux pentes du Kilimandjaro et qu'il fut honoré et encouragé tout au long de son périple par les tribus Masai qu'il croisa. Le pont fut fini en février 1899 et détruit par les Allemands lors de la seconde guerre mondiale. Lcm

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