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Et plus encore ! par Lechainonmanquant

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En cette fin de journée de juillet, la chaleur était suffocante. Ne pouvant me reposer dans l'appartement, je descendis dans la rue faire une promenade pédestre. Passant devant le jardin extraordinaire de Mr Trenet, je ne sais ce qui me fit y pénétrer, peut être le rugissement caverneux du lion en pierre juché à l'entrée. Il me fixait d'un oeil froid et cynique m'attirant irrésistiblement à l'intérieur du parc. Après quelques instants de réflexion, j'ouvrais le portail. Son cri strident et sinistre aurait dû me faire prendre conscience que je m'aventurais dans un endroit peu singulier. A la recherche d'un peu de fraicheur, je me dirigeais vers un petit bosquet arrosant généreusement d' ombre une allée. Ce qui me stupéfia, ce ne fut pas la couleur rose des frondaisons, mais le doux fredonnement des feuilles, se frottant les unes aux autres et se pamant comme des précieuses. Cette sonate de violon était dirigée par Eole en personne, rythmant et modulant les courants d'air qu'il envoyait par de larges brassées se perdre dans le feuillage. Me laissant bercer par cette mélodie, je me mis à chantonner et à tapoter du pied. Sous mes chaussures, le crissement du gravier se mêla au son du violon, atténuant leurs saccades et muant la sonate en symphonie. A quelques pas de là un viellard aux longs cheveux blancs, assis dans l'herbe faisait pleurer une scie en la tordant rageusement dans tous les sens, et comme pour se faire pardonner, la cajolait en la caressant tendrement avec un archet. A ce concert il ne manquait plus que le souffle d'un orgue, derrière moi de grosses flaques d'eaux boueuses se mirent à synthétiser les notes du king de l'église, passant d'une ornière à l'autre, se gargarisant, se vidant, pour s'assembler à nouveau. Elles donnèrent toute la puissance sonore à cet orchestre. Un cerisier aux fruits de bronze se mit à se trémousser suivant le rythme de la musique en faisant tinter ses clochettes d'un timbre pur et cristalin. Je m'ennivrais de ces tintements et éclatais de rire de voir un banc danser maladroitement avec une chaise, lui marchant sur les pieds et s'excusant de lui avoir abimé son vernis. Au loin des buissons se rassemblèrent et s'approchèrent du bosquet et participèrent à ce concert en faisant bruire leurs épines, suivant attentivement la mesure de maitre Eole. La musique s'estompa doucement et on écouta une araignée gratter les cordes d'une harpe qu'elle venait de tisser. L'effet angelique de de la mélodie attira un rossignol. Il vint se poser sur une branche du cerisier et consentit à faire un récital des plus beaux gazouillis de son répertoire. Je m'allongeais dans l'herbe jaunie par l'été et fermais les yeux afin de mieux percevoir le chant de ce soprano. Une violente détonnation me fit me relever brusquement. Pétrifié, je vis que le ciel venait de cracher une langue de feu dans les buissons. Le crépitement des flammes couvrait le son de la harpe. L'araignée d'un air cynique n'avait cessé de jouer. Dans un bruit de tôles froissées, le banc et la chaise détalèrent et disparurent à l'horizon. Les violons reprirent et vibraient langoureusement. Les grondements du ciel qui pertubaient ce concert s'assagirent quelque peu. Un souffle paisible et régulier pris naissance dans les flammes et je vis apparaitre la mort, martelant le sol de sa faux. C'est elle qui prit la direction de l'orchestre. Les cloches se mirent à sonner à la volée, les violons interpretèrent Vivaldi, l'orgue du Bach. Tout n'était plus que cacophonie La mort leva sa faux, et tous les instruments se turent. Ce silence était encore plus pesant d'inquiétude et d'angoisse. D'un pas feutré la dame blanche s'approcha de moi , me tendit la main, et d'une voix suave me dit: "Il nous faut partir, l'éternité nous attend". Des gouttes de sueur perlèrent sur mon front, ma gorge brûlait et mon coeur frappait rageusement dans ma poitrine. Il fallait que je réagisse, que je m'échappe, mais mes jambes refusérent de bouger. Je me concentrais et fis appel à toute mon énergie, je gonflais mes poumons et allais crier de toutes mes forces quand une sirène se mit à hurler au loin, me privant d'exalter ma rage. Péniblement je levais un bras et arrêtais la sonnerie de mon réveil ! La journée s'annonçait plutôt mal après une pareille nuit. J'enfilais nerveusement mon pantalon, un petit lutin du papier peint , habillé d'une salopette de jardinier me regardait et me fit un clin d'oeil, puis s'en alla à l'aide d'une échelle cueillir les cerises de bronze........ Lcm

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