Elle voulait voir la mer, Marie-Ange c'était son truc, sa réplique favorite. Hiver comme été, jour et nuit, encore, elle voulait voir la mer. Et le bleu, et le vert. Flux et reflux. Obsession. Mission...
J'ai enfin compris une fois arrivé sur les bords de l'océan au soleil couchant.
Incendie involontaire allumé sur les eaux salées. Le soleil rouge descendait lentement, il s'enfonçait là-bas au loin, solitaire.
Marie-Ange avait plongé droit devant, illuminée, presque embrassée rejoindre l'horizon, l'astre flamboyant qui doucement changeait d'atmosphère. De profundis en latin.
Et c'est sur ce fond d'or façon peinture qu'elle se noya volontaire.
Je veux voir la mer qu'elle disait sans cesse.
Alors voilà, c'est fait !
J'ai aimé Marie-Ange comme on aime un enfant, envers et contre tout. Tout autour d'elle, j'avais dressé des remparts pour la protéger des ennuis de la vie d'ici. Un édifice bien fragile pourtant, remparts de brindilles en fait, que le souffle du temps a dispersé au vent mauvais.
Et puis d'abord, la protéger de quoi ? Qui suis-je pour tenter d'inverser le cours des choses ? Les fleuves vont à la mer, inexorablement. Et les amoureux n'ont que leurs yeux pour pleurer. Mais ça, tout le monde le sait.
On aime parfois une femme plus fort que les nuages dans le ciel ou le bleu de la mer. C'est un feu qui brûle toujours. À la source de nos pensées, notre amour occupe ainsi l'espace en entier, au profond.
Alors noyée, Marie-Ange marche sur mes eaux alcoolisées. Morte, elle vit autant qu'avant au-dedans. Et tant pis si je mens pour dire la vérité. On fait comme on peut, désolé.
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