Le chemin serpentait en chaotiques ondulations. Dautres chemins, certains descendus du nord, dautres se pressant vers le sud, le croisaient. Des routes, sorties de nulle part, vertigineuses, chargées de temps paradoxaux, saffairaient là. Les unes porteuses de passé, les autres de futur.... Elles convergeaient dans le désordre et le bruit, et sattardaient un peu, parallèles pour un instant, divergentes un peu plus loin....
Réseau serré de fines veines bleues qui couraient sous et sur la terre...Le monde sétait quadrillé. Nos pas, dans des allées parfaitement symétriques, suivaient dabord une ligne droite, puis pénétraient enfin dans un cercle qui lentement sur nous se refermait. Au bout de nos doigts tendus, fouillant, comme des yeux vides, une mer sans balises, rien dautre quune frontière, un barrage, une impasse. Dans ce petit périmètre clos, nous déambulions aveuglés par une brume dense, en évitant de trop nous heurter, de nous cogner aux murs lépreux, de nous déchirer aux barbelés, de nous faire prendre au piège dune morne prison, ... de nous perdre dans des déserts accablants ...
Nous marchions en silence. Sans boussole ni sextant. Sous un ciel bas qui pesait sur nos fronts. Nous traversions des villes obscures, peuplées de fantômes, dombres grimaçantes et de cris de chouettes.
Parfois cependant, au détour d'un sentier plus amène, de ces brouillards épais, émergeaient en riant quelques silhouettes folles et dansantes, légères et un peu ivres. A voir sagiter joyeuses ces figures en couleur, au milieu de la nuit, nous étions certains désormais que cette errance folle avait un sens.
Et quelle valait la peine ....
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