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Nettoyage à sec par Brian K

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Il était sorti vers midi, sentant ses jambes lui réclamer leur ration hebdomadaire de bitume. C’étaient les jambes d’un homme habitué à parcourir des kilomètres par n’importe quel temps, sur tout type de terrain, d’épaisses et longues jambes qui transportaient le reste de son corps presque silencieusement pendant que ses yeux observaient autour de lui. Les corbeilles de fruits impeccables en vitrine de l’épicerie du Boulevard Saint Aignan, un endroit où il aimait bien venir faire quelques courses les dimanches après-midi d’automne et d’hiver sans savoir pourquoi c’était un magasin qu’il fréquentait moins le reste de l’année. Un détour pour éviter la Place Mellinet, qu’il trouvait d’un classique triste et ennuyeux. Derrière les murs d’un jardin dans une rue dont le nom lui échappait, l’œil noir de cyclope d’un tournesol de plus de deux mètres qui se tenait encore droit mais pencherait bientôt la tête d’un air fautif. Puis, tout droit devant lui, les huit-cents mètres du Quai de la Fosse bombardé de soleil. Ou bien c’était peut-être un kilomètre, à moins que ce soit finalement beaucoup moins. Difficile à dire tant cela semblait long et ennuyeux. Dans une teinturerie où s’activaient deux repasseuses, un ventilateur sur pied qui tournait. C’étaient vraiment de gros fers qu’elles manipulaient, et les câbles électriques suspendus au plafond dansaient comme des serpents énervés – mais on ne pouvait être sûr de rien : il pouvait tout aussi bien s’agir d’une parade nuptiale. Trois ou quatre bars à hôtesses, des parasols publicitaires sous lesquels des filles l’accrocheraient certainement pour boire un verre sans savoir qu’elles n’avaient pas la moindre chance avec lui. Il y avait aussi des bars normaux où on ne proposait pas de sexe. Des bars très simples qui donnaient sur la Loire et il n’était écrit nulle part, dans aucun guide ou dépliant touristique, que la Loire à cet endroit ne sentait pas très bon. En contrebas du pont Anne de Bretagne, il savait qu’on pouvait encore voir les piles du pont transbordeur qui n’existait plus que sur des cartes postales en noir et blanc – des pieds de géants sciés au niveau de la cheville. Est-ce que c’était bien raisonnable de s’arrêter boire un vin blanc en route en sachant que de toute façon il poursuivrait ensuite jusqu’à la Place du Bouffay, où il ne manquerait pas de commander au moins une bière ? Peut-être pas, mais il n’y avait pas lieu non plus d’en faire toute une affaire. Un homme qui vit seul a de temps en temps besoin d’entendre parler autour de lui et, dans la mesure du possible, il tenait à choisir son type de conversation, comme on choisit le parfum d’une glace.

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