Je m'étais levée tôt mais pas tant que le jour.
Voilà, le printemps était là, matinal, impatient.
Ce qui était bon, c'était la vitre baissée, l'odeur de la sève, ce petit vent dans mes cheveux courts (bonne idée de m'arrêter chez la coiffeuse au passage). La dernière neige fondait à vue d'il (un peu ébloui, l'il, et clignotant). Les labours fumaient. En bas il y aurait des amandiers en fleurs, sûr.
Il y en a eu, à l'aller, et au retour dans la lumière de fin d'après-midi, et des papys à vélo, des talus verdoyants, des bleus de Delft entre les nuages, de bouffées de parfums verts sur fond d'humus un peu passé, et dans les haies le long de la Durance et dans les bosquets des collines et dans le moindre buisson buissonnant il y avait partout cette aura légère de la montée de sève, ce flou, ce vibrato de gris colorés dans les ramures.
C'était le printemps, tardif et impatient, j'ai eu envie de sexe, dans le genre montée de sève et bourgeon turgescent, basique, végétatif, quasiment sans objet, du genre qui vous embarque dans un coin de clairière ou la fraîcheur d'un porche avec le premier venu pour peu qu'il danse bien la valse ou le rock ou qu'on ait marché d'un bon pas dans quelque raidillon ou pris langue un peu bêtement acagnardé chacun devant sa bière à la terrasse d'un café sur le vieux port
Ça m'a fait plaisir, et pour tout dire rassurée, tant il m'a semblé souvent ces dernières semaines que ça ne me reviendrait jamais, la bête envie de baiser, que je trouve, depuis toujours, si simple, si gaie.
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