Au chômage venu, l'Auguste se trouva rapidement fort dépourvu car ses économies fondirent comme cachet d'aspirine tombé dans un verre d'eau. Mais le rongeait plus encore la solitude en laquelle l'enfermait le fait d'avoir du rompre avec un travail d'équipe qui avait toujours été le sien, équipe où il avait acquis estime et respect pour son savoir-faire tout à fait unique puisqu'en l'atelier culinaire Dubout et Dubout, il avait mis au point une incroyable recette de soupe aux chardons dont l'indicible bouquet recueillit l'unannime coup de foudre de toutes les tables aussi étoilées que Maréchaux de France !
Les Dubout et Dubout ayant également quelque appétit pour les recettes financières, ils s'empressèrent de déposer un brevet pour protéger la divine soupe mais comme leur estomac était plus de boeuf que de grenouille, ils eurent, vis à vis de notre Auguste, l'inélégance des goinfres et, sans préavis, le licencièrent afin de ne pas avoir à lui accorder les royalties qu'il méritait.
Voilà une bien triste fin, me direz-vous, mais Auguste ayant plus d'un nez rouge dans sa besace, il concocta un breuvage qui se mariait souverainement avec sa célèbre soupe. Les carnassiers Dubout et Dubout ne tardèrent donc pas à lui acheter très cher cette nouvelle trouvaille mais sans se douter que l'Auguste, à la liste des ingrédients, avait généreusement et pour eux seuls, ajouté une plante aux vertus cachées, plante qui, avec effet retard, provoquait chez les convives de très inconfortables maux de ventre...Je vous laisse maintenant imaginer ce que fûrent promptes et réjouissantes suite et fin de la maison Dubout et Dubout.
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