Il vint enfin le jour où le calendrier universel
Mit un signe dégalité, comme léquinoxe,
Entre les années passées en ma patrie
Et celles vécues en terre étrangère.
Une question se mit à me tourmenter :
A quantité égale, que devenait la qualité ?
La quantité ne suffisait pas à combler
Les galeries par lexil creusées dans mon esprit.
En ce matin du 4 octobre 1987,
Le soleil dautomne caressait la ville,
Sur la Place Doyen Gosse jattendais
Lénième train pour le pays de lillusion.
Jétais au comble de la mortelle lutte
Que la première langue livrait à la deuxième :
Les mots me trompaient et me ridiculisaient,
Parfois ils mobligeaient à suspendre la course.
Je savais déjà que le monde condamnait
Lamour que je portais à la poésie.
Ceux qui comptaient les jours de mon absence,
Bêtes aux aguets, attendaient mon retour,
Jentendais leur respiration animale
Avant quils me jettent à la figure
Tous mes vers semi-clandestins
Sortis de dessous mon manteau.
Le pain de lamitié nétait pas cuit,
Ils naimaient pas mes vers.
Rien ne pouvait se partager,
Sinon mon amertume et leur indifférence.
Longtemps jai rêvé que mon corps
Soit livré par les courants de la Mort
Sur les plages ioniennes, bercé
Par léternel monologue de la mer.
Ma chair corrompue finira ses jours
Derrière les parapets européens,
Barbelés dressés contre mes mots,
Haine pour mes livres semi-avortés.
Quand viendra le juste crépuscule,
Jirai minstaller à lombre de mon figuier,
Tout près de ma vigne aussi étrangère,
Brûler mes cahiers, mes écrits semi-clandestins,
Et tous les mots qui mont trahi :
Que tout soit cendre et dans les cendres
Mes cendres trouveront enfin la communion
Des poètes morts avec les vivants.
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