En matière de soutien gorge, jai lachat impérieux et la fidélité chevillée au corps comme une seconde peau.
Je ne me suis rendue compte de ce phénomène que lors de mon dernier achat et du coup, je suis allée fouiller dans mon casier à soutien gorge.
Je les ai visités comme on visite un ancien carnet de bal.
Je suis incapable de les jeter (enfin, certains si,
ceux sur qui je ne peux pas mettre un nom) et pour tout avouer, ils mencombrent plutôt.
Il y a le tout premier, taille 70, en coton et broderie anglaise, de marque Rosy. Son blanc virginal nest plus quun lointain souvenir mais jamais il na été fébrilement dégrafé : javais 10 ans et je rentrais en 6ème.
Le deuxième plus ancien, cest un soutien gorge dallaitement. Cest mon mari qui lavait acheté pendant que jétais à la maternité, je débordais des miens sans plus pouvoir contenir mes seins gonflés. Il avait, je me souviens du fou rire des vendeuses lorsquelles mavaient raconté sa visite, demandé la taille 150 ! Il avait juste déplacé le 0.
Ces deux là, je les trimballe de déménagements en déménagements, ils ont accompagné une partie de mon histoire.
Puis il y a un grand vide pour arriver à ce bleu. Cétait la première fois que josais porter de la couleur. Je lavais acheté en Bretagne lors dun voyage de rattrapage de couple. Il ne devait pas être à la hauteur de ses espérances, le couple sest détricoté tout doucement. Mais ce soutien gorge est resté.
Il y en a un qui manque, très peu porté, perdu sans doute... A. avait laissé un message sur mon répondeur : « je viendrai te chercher à Orly, prends une tenue légère ! » En plein mois davril pluvieux et froid, je métais dit que pour cet anglais, une « petite tenue » était peut-être ce quil appelait une tenue légère. Il navait même pas remarqué le jaune soleil de cet accessoire quil avait jeté à lautre bout de la chambre dhôtel de conte de fée dont les fenêtres souvraient sur les jardins de lAlhambra.
Pas plus que le soutien gorge, pourtant superbe, cette relation navait duré : jy étouffais.
P. mavait offert « Les communistes » roman-pavé dAragon. Son soutien gorge fut rouge. Durant les cinq ans qua duré notre relation, il ne sest pas passé six mois sans que je prenne la décision de le quitter, mais chaque fois, il disait LE mot, faisait LE geste qui me retenait encore un petit peu.
Je fis lachat de ce soutien gorge à loccasion de la dernière tentative de construire quelque chose de vivable entre nous.
Celui-là, je lai usé jusquà la trame. Il était vraiment ma deuxième peau.
Délavé, détendu, déchiré, je le portais encore il y a quelques mois, malgré les autres, les nouveaux.
Mais allez donc savoir pourquoi ce sont les soutiens gorge de la dernière chance que je garde de ces deux P. ? (mon mari aussi était un P.)
Ensuite il y en a eu deux bleus (ciel et marine) et un blanc, mais cétait juste des plans cul. Sans commentaire.
Il faut bien changer de sous vêtements de temps en temps.
Puis un gris et rose. Je laime beaucoup celui-là. Je sens que je vais avoir du mal à men séparer
Et puis dernièrement, lorsque lidée est venue me caresser que peut-être il serait temps que je fasse de la place pour quelquun qui vienne mettre ma tête, mon cur, mon lit et ma vie à lenvers, jai ressenti ce besoin impérieux daller faire lacquisition dun nouveau soutif, alors que je nen ai nul besoin.
Je porte dailleurs en ce moment ; il est tacheté de mauve et de parme sur fond violet foncé. Mais ce nest quaprès le premier lavage à la main (comme il se doit), qui a suivi un premier rendez vous, que je me suis rendu compte que, cachée sous la rose, entre les deux seins, il y avait une initiale.
Croyez moi ou non, cest celle du prénom de celui sur qui jai jeté mon dévolu !
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