Si tu n'aimes que l'aïoli à Nice
Sache que tu m'ailles au lit aussi
Tes gousses huilées si ïolies,
Comme deux caïeux à noeud, te dis.
Comme è'me feront saïver jusqu'à ïeudi...
En attendant vendredi, pas encore né,
Je me la fais sole, ma tranche dorée,
Anchois, c'est pas un souci, que nenni,
Mais je préfère le jour qu'on aille au lit.
Avec un p'tit poisson dans le chaudron
On se les caille moins sous l'édredon.
Je suis ta morue, t'es mon bulbeux
Y'a pas de mal à se rendre heureux.
Mes vapeurs pour la carotte et mon chou
S'il est pommé, tu sais toujours où le trousser,
Point besoin de rut à Baga, ni de broc au lit,
Asperges et fenouils sont de bons amis
Amène tes oeufs, j' me charge de l'huile
Car demain je foulerai de l'olive à genoux
Et mes lèvres en filet perleront d'la sève moirée.
Car demain, mon petit poisson d'orge épanoui,
C'est vendredi, et y'a pas qu'à Nice qu'on aïoli.
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
"Autour d'un bon ailloli, bien monté et odorant et roux comme un fil d'or, où sont, répondez-moi, les hommes qui ne se reconnaissent point frères ?"
Frédéric Mistral
↧