Jaime les bancs.
Un banc ressemble par sa physionomie, à tous les autres bancs, mais, en y regardant de plus près, on saperçoit que ses couleurs parfois diffèrent, que les volutes des bras et des pieds ne se ressemblent pas toujours.
Certains sont ébréchés avec le temps, rouillés, une latte sabsente sans que lon sache vraiment pourquoi. Besoin dévasion, de voir dautres visages, dautres culs sans doute.
Lorsque jétais enfant, mon grand-père minstallait les après-midi au square, toujours sur le même banc, en face de lhorloge fleurie.
Assis, mes petites jambes suspendues, sagitaient au-dessus du vide, comme des aiguilles marquant une heure buissonnière, dans lattente enfantine de la voir sanimer, que les fleurs sous leffet du soleil soudain frémissent.
Il me laissait là, avec pour compagnons de voyage, un livre et un papier de soie où sembrassaient à la colle, quelques bergamotes ensoleillées.
Je serrais fiévreusement le tout contre moi, comme si je tenais dans mes petites mains, la carte dun trésor que nul naurait pu me subtiliser.
Tout autour, bruissait. Le vent dans les platanes sinsinuait, jouant avec le feuillage mordoré, achevant dune brusque et tendre bourrasque à décrocher ça et là une feuille.
Je la suivait du regard, hésitante, gracile danseuse, séchouant lascive sur le sol, après avoir mollement virevoltée dans lair.
Des passereaux joueurs dessinaient sur un rythme syncopé dinvisibles arabesques en un ballet millimétré, où chacun tenait son rôle. Un battement dailes ici, un petit saut là. Le temps se suspendait.
Jobservais la danse mi intrigué, mi amusé. Chacun se mettant à la tâche, entamant une ronde à la chorégraphie, un instant désordonnée et celui daprès, digne du mouvement perpétuel.
On devinait des symétries, des courbes, des lignes droites. A grands coups de leurs plumes, ils redessinaient la nature environnante, éveillant tout un monde endormi.
Celui où se cachent les sourires denfants. Je nai pas ouvert mon livre
et le papier de soie sest envolé.
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