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Affinités Electives par Brian von Roberts

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C’était une photo que je connaissais depuis longtemps. Depuis presque toujours. On y voyait, assises l’une à côté de l’autre, la dame blonde et la dame brune. Je devais avoir seize ans. Le livre dans lequel la photo était insérée n’expliquait pas le pourquoi du comment de la rencontre . A gauche sur l’image, il y avait la dame qui chantait et dont le prénom était Ella. A ses côtés, la dame en vison s’appelait Marilyn. Deux monstres qui se souriaient. Pas d’explications, pas de contexte. Le livre, consacré à la dame blonde, expliquait simplement que la dame brune était l’artiste préférée de la première. C’est une si belle histoire que je regrette de ne l’avoir apprise qu’il y a quelques temps. Une histoire qui tient en quelques lignes. Milieu des années cinquante. La dame blonde s’est éloignée pour quelques temps des studios californiens où elle se voit comme une actrice sous-employée qui étouffe. L’air frais dont elle a besoin, c’est à New York qu’elle est venue le chercher. Une pause d’environ deux ans. La dame brune est une chanteuse noire qui, comme le veut la société à l’époque, ne peut chanter que dans des clubs de jazz tenus et fréquentés par des noirs. Précisément, à Harlem. Harlem, pour la dame blonde qui se fout bien des conventions, ce n’est pas le bout du monde. Ce n’est rien d’autre qu’une porte à pousser. Très facilement, un soir, elles font connaissance. La blonde est venue écouter chanter la brune. Naissance d’une amitié ? Presque. Les dames ne seront pas appelées à se revoir très souvent, l’une et l’autre ayant leurs obligations. Mais naissance d’un respect mutuel et d’immense connivence, ca, oui, c’est indéniable. Quelques mois plus tard, c’est à la dame brune de faire le voyage en sens inverse. Direction Los Angeles. La dame blonde, qu’on dit très superficielle, apprend avec le plus grand agacement qu’à Los Angeles il ne se trouve toujours aucun club de jazz tenu par des blancs qui veuille programmer son ami brune. Ni une, ni deux, elle appelle le Mocambo , qui est le plus grand club de LA. Très consciente de ce qu’elle représente, elle tient à peu près au directeur de l’établissement le discours suivant : « C’est Marilyn à l’appareil. Je voulais juste vous prévenir de deux ou trois petites choses. En un, je suis disposée à venir chez vous tous soirs pendant un certain laps de temps. En deux, je serai sur mon 31. En trois, je serai assise au premier rang, place du milieu. En quatre, vous pouvez prévenir la radio, la presse et qui vous voulez. En cinq, il y a une toute petite condition à tout ça: que vous vous bougiez le cul et que vous vous décidiez à programmer Ella Fitzgerald. « Quelques années plus tard, Ella Fizgerald était la chanteuse préférée de tous les américains. Et elle répéta aussi longtemps qu’elle put qu’elle avait une dette à vie envers Marilyn Monroe.

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