Je pense à toi, parti de l'autre côté de la mer et je me souviens.
Je me souviens comme j'aimais "respirer longtemps, longtemps, l'odeur de tes cheveux, y plonger tout mon visage", comme une femme vient puiser dans l'eau d'une source, et plonge sa bouche sèche en quête d'un peu de fraîcheur, puis la souffle dans l'air en pluie de fines gouttelettes d'argent.
Je me souviens de toi quand tu souris, ton visage qui s'éclaire, tes yeux qui brillent, les petites rides autour de tes yeux, ton charme qui irradie et m'envahit
"Si tu pouvais savoir tout ce que je vois ! tout ce que je sens ! tout ce que j'entends" dans tes cheveux ! le parfum qu'ils exhalent est pareil à cet air de musique, chaud et envoûtant, sensuel et troublant que jadis tu me chantais. Il y a dans tes cheveux comme une odeur de moi, l'odeur précise de ce coin secret de ma peau, où tu es venu te perdre..... et aussi me trouver...
Je me souviens de toi quand tu ris, tu renverses la tête en arrière, tu te lâches, on dirait un enfant.
"Tes cheveux me parlent de tes rêves, de chemins, de ruisseaux". ils peignent de bleu de profonds océans et des iles en collier, et me plongent dans de silencieux abysses, puis me déposent sur des rivages dorés. Ils embaument les fleurs, les fruits et les coquillages.
Je me souviens de ton air sérieux quand tu me racontais ta vie au Liban, la guerre, la ville ravagée ; je ne t'écoutais qu'à moitié, je te regardais, m'imaginais dans ta ville, dans tes bras.
"Dans l'océan de ta chevelure", j'entrevois ce village où tu es né, où les hommes fidèles se serrent autour de cheminées, la sueur et des larmes perlent de leurs yeux... Ils brassent leur fatigue dans des tasses à café et réclament en riant un alcool à la goulée...
Je me souviens aussi quand tu avais un peu trop bu, les mots qui se heurtent, le débit qui s'accélère ; tes mains m'effleuraient, ton corps se rapprochait, ton odeur, subtil mélange d'eau de toilette et de tabac me faisait tourner la tête.
"Dans les caresses de ta chevelure, je retrouve les langueurs des longues heures passées sur un divan", dans une chambre de bois ciré, là haut sous les toits d'une ville inconnue où tu m'avais entrainée. "Dans l'ardent foyer de ta chevelure", je respire l'odeur du tabac et le miel et l'anis ; "dans la nuit de ta chevelure", je vois les étoiles semées dans le ciel ; à l'orée claire de ta chevelure je m'enivre de ces humus de sous-bois mouillés. "Quand je mordille tes cheveux élastiques et rebelles", je deviens l'ogresse de tes pensées.
Je veux vivre avec ces souvenirs, je veux me rappeler tes yeux au fond des miens, tes bras qui m'enserrent, tes mains qui m'étreignent ; quand je pense à toi, je souris, je revis.
Texte d'Amordemisamores et Annaconte composé à deux voix, quatre mains, sur une musique de Charles Baudelaire d'après "Un Hémisphère dans une chevelure".
Ce texte a pu voir le jour grâce à Itinerrance, qui a servi de lien, et qu'on remercie infiniment.
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