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Une épopée niçoise. par Almond

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C'est une publication de circonstance, une commande sans doute, préfacée par l'inénarrable Maire de Nice, en l'honneur du 150ème anniversaire du rattachement de Nice à la France. Anniversaire célébré avec force patrouille de France, candélabres grotesques et autres expositions de crinolines dans la capitale azuréenne en juin dernier. Autant dire que c'est avec une circonspection amusée que nous ouvrons cet ouvrage. La première partie du livre, rédigée par Alain Ruggiero, Maître de conférence en histoire contemporaine à la faculté de Nice, décrit de façon passionnante et synthétique, photos et gravures d'époque à l'appui, la vie du Comté de Nice en 1860, au temps où la ville appartenait au Royaume de Piémont- Sardaigne. Elle retrace les circonstances et les choix politiques à l'origine de l'annexion.* Cette partie historique introduit un court roman de 144 pages. Deux frères, ouvriers sur le Port de Nice, vont combattre l'envahisseur autrichien, puis s'opposer sur le rattachement de Nice : doit- elle appartenir à l'Italie du grand Garibaldi (enfant héroïque de Nice), ou accepter la "chance" que lui offre la prospère France de Napoléon III ? Et là, surprise, ne boudons pas notre plaisir : c'est un régal ! L'auteur, chartiste et directeur des archives de Nice, échafaude avec fougue, délicatesse et légèreté un véritable univers. La Nice d'antan renaît avec ses petits métiers, ses riches hivernants, entre les soupentes de la ville ancienne et les "folies" rococco, et l'Histoire revit, portée par les histoires romanesques et vibrantes de personnages denses et passionnés. Le style, hommage ou discret pastiche, ranime des réminiscences d' auteurs russes et anglais de l'époque. Une aérienne ironie n'est pas absente, au détour d'une description de vieille anglaise ou de russe cacochyme. L'auteur se coule dans la psychologie de personnages contrastés, de la petite lavandière éblouie par le luxe, au jeune Lord cynique et blasé, sans jamais les juger ni les mépriser, sans non plus ce regard d'entomologiste que l'on pourrait craindre sous une telle précision clinique, mais toujours avec empathie et humanité. De la sauvagerie insoutenable des massacres de Solférino aux timides espoirs d'un cœur amoureux, sa plume est rompue aux scènes de combat comme aux plus secrets territoires de l'âme. Parfois c'est sa propre voix, discrète et comme en sourdine, qui s'élève à l'occasion d'une réflexion solitaire, comme contemplant le théâtre de l'Histoire depuis sa position d'écrivain, à la fois détachée et sensible : "Un froid sec, tonifiant, était tombé sur la montagne. Enroulés dans leurs couvertures, ils ne le sentaient pas. Ils s'assirent sur les premières marches du cimetière, et partagèrent leur repas en silence, bercés par la fatigue de la marche, et rendus muets, aussi, par la stupéfiante beauté du panorama qui s'offrait à eux. Les montagnes découpaient leurs crêtes d'un noir un peu plus sombre dans le noir de la nuit. Les pierres plates des toits du village, à leurs pieds, s'entremêlaient le long des rues et scintillaient légèrement en reflétant les étoiles." L'air de rien, un tour de force, que de recréer en si peu de pages cette page de temps, d'histoire, d'espoirs et de combats, en lui donnant chair et âme, grâce et émotion. Amoureux de Nice, vous le serez forcément en quittant ce discret ouvrage, dont l'auteur promet de nous surprendre par de futures œuvres, plus personnelles encore, et libérées de la contrainte historique. ************************************* * pour info : "avant tout la volonté de Napoléon III, qui veut aider l'Italie à faire son unité, dans le but de contenir l'Autriche. Pour éviter, cependant, de créer un État unifié potentiellement dangereux juste à côté de la France, l'empereur réclame en échange de son aide, le duché de Savoie et le comté de Nice, qui constituent deux régions stratégiques importantes sur le plan militaire. Le principe de cet échange est établi en 1858, lors des accords de Plombières, entre Napoléon III et Cavour. Le Traité de Turin, le 24 mars 1860, entérine le changement de souveraineté de la ville. La population niçoise semble tout d'abord assez réticente. Elle finit cependant par accepter le changement de souveraineté lorsque le roi Victor-Emmanuel II de Savoie, le 1er avril 1860, lui demande solennellement de le faire, au nom de l'unité italienne. Un plébiscite est voté le 15 et le 16 avril 1860. Le oui emporte 83 % des inscrits dans l'ensemble du comté de Nice et 86 % à Nice, en partie grâce à la pression des autorités (curés, syndics, fonctionnaires)."(Wikipedia)

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