Elle est pas si mal, ma camisole.
Presque confortable.
Surtout qu'ils veillent à bien me l'ajuster, à "faire des petits réglages", comme ils disent. J'ai droit à du sur mesure. Pour un peu je me sentirais jolie, élégante. Du Seresta en guise de boutons de nacre, six par jour - en plus des huit autres comprimés.
Elle est douce, ma camisole. Je crois que c'est du coton. Peut-être est-ce une matière changeante ; coton, soie, mohair... Parfois elle laisse des petits jours quand même, et alors ce sont des piqûres de réalité qui traversent.
Depuis qu'on m'a ajouté des boutons de nacre, je me sens bizarrement calme. Un calme artificiel.
Je ne peux plus dire que mon cerveau part dans tous les sens, ni que je suis paralysée par une mélancolie latente. Les angoisses sont emmitouflées quelque part.
Je me sens comme dans un paysage de neige. Tout est étouffé.
L'inconvénient, c'est que ma capacité de réflexion est étouffée aussi. Lire, Ecrire, penser, tout m'est difficile. Je dois me contenter de facile, de simple. Ma concentration est bien entamée. J'évite de conduire. Je ne sais plus me plonger dans un bouquin. Je ne peux plus rester longtemps toute seule. Je titube.
Je vous épargnerai la totalité de la liste des effets secondaires...
Je sais que c'est transitoire.
Parfois je rêve que quelqu'un me la fasse oublier un peu, ma camisole.
M'extirper de ce grand sommeil.
Sentir ma peau nue respirer un grans coup.
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