Quantcast
Channel: Les commentaires de Pointscommuns.com
Viewing all articles
Browse latest Browse all 5180

La danse de l'amour et de l'étrange par Abicyclette

$
0
0
J’aime la poésie. Vous me direz que vous vous en foutez et vous aurez bien raison. Je le dis quand même : c’est en écrivant et en butinant sur ce site que je me mets bien des idées au clair. J’aime lire la poésie J’en lis peu, très peu à la fois… et lentement … trèèès lentement… En général je n’y comprends à peu près rien. Je relis, je laisse : une étrangeté est là. J’aime les poètes : ils ne nous servent pas du pré-digéré, ils prennent garde à ne pas mettre trop de sucs gastriques dans leur cuisine interne. Plus tard, après une minute, une heure, un jour, un an, j’y reviens. Cet univers est clos, je lui tourne autour. Il y a là une façon, une tournure, une nature… une musique… Je comprends et je ne comprends pas ; Parfois il n’y que deux mots qui me vrillent le neurone mais l’altérité est là, il y a du mystère, ça m’intéresse. J’essaie d’ouvrir la porte, elle s'entrebâille, je saisis un truc. Une fenêtre de tir s’est ouverte (type Cap-Canaveral). Puis c’est là…… ça m’accompagne, ça me colle aux basques, parfois ça me tatoue à vie. J’aime la poésie : elle « m’oblige » à rester éveillé, naïf, elle me garde une fraîcheur, elle me fait « sentir l’amour devant tout ce qui passe, ne point passer » ; elle avive mes couleurs. Bref, chaque fois je réapprends à l'aimer. Ce matin dans le métro en partant signer tout un tas de papelards rédigés dans un style très comique –la langue administrative- je reprends le Gai Savoir, page au hasard, que telle occasion me fit feuilleter il y a quelques jours, ici-même. « Il faut apprendre à aimer – voici ce qui nous arrive dans le domaine musical : il faut avant tout apprendre à entendre une figure, une mélodie, savoir la discerner par l’ouïe, la distinguer et la délimiter en tant qu’une vie en soi : ensuite il faut de l’effort et de la bonne volonté pour la supporter, en dépit de son étrangeté, user de patience pour son regard et pour son expression, de tendresse pour ce qu’elle a de singulier ; - vient enfin le moment où nous y sommes habitués, où nous l’attendons, où nous sentons qu’elle nous manquerait si elle faisait défaut ; et désormais elle ne cesse pas d’exercer sur nous sa contrainte et sa fascination jusqu’à ce qu’elle ait fait de nous ses amants humbles et ravis, qui ne conçoivent de meilleure chose au monde et ne désirent plus qu’elle-même, et rien qu’elle-même. Mais ce n ’est pas qu’en musique que ceci nous arrive : c’est justement de la sorte que nous avons appris à aimer tous les objets que nous aimons maintenant. Nous finissons toujours par être récompensés par notre bonne volonté, notre patience, notre équité, notre tendresse envers l’étrangeté, du fait que l’étrangeté peu à peu se dévoile et vient s’offrir à nous en tant que nouvelle et indicible beauté : - c’est là sa gratitude pour notre hospitalité. Qui s’aime soi-même n’y sera parvenu que par cette voie : il n’en est point d’autre. L’amour aussi doit s’apprendre » -- « Sentir l’amour devant tout ce qui passe, ne point passer ! » tiré d’ « Au bord de l’eau » de Sully Prudhomme, poème mis en musique par Fauré http://www.youtube.com/watch?v=P2rD8prRaHs : par Gérard Souzay http://www.youtube.com/watch?v=N-_4AgDnPuI : par Véronique Gens Je peux aussi, avec bonheur, accompagner de mon piano toute rose soprano qui voudrait m’aider à ce que mes couleurs ne passent point … la partition ici : http://petrucci.mus.auth.gr/imglnks/usimg/3/3b/IMSLP24104-PMLP54682-Faur___-_Au_ bord_de_l_eau__Op._8__No._1__c-sharp_.pdf

Viewing all articles
Browse latest Browse all 5180

Trending Articles