Sur la piste endiablée des hommes et des femmes
Se déchaînent en cadence. L'atmosphère surchauffée
Grise les esprits brûlants et senivrent les âmes.
Les corps qui se déhanchent se frôlent, intimité
Se créant sous les spots dorés et argentés.
Au plafond coloré lénorme boule de cristal
Tourne très lentement, telle une planète nimbée.
Mille faisceaux irradient une lumière idéale.
Soudain, une silhouette à la chevelure de feu
Si étrange, se faufile au milieu des danseurs.
Souple liane elle fait vibrer son corps, et ses yeux
Jetant des flammes ivres aux nuances des couleurs.
Valse déroutant lespace et le temps qui dérivent
Et flanchent sous les pieds de la salle en émoi.
Superbe équilibriste en sa passion si vive
Cette muse fatale se contorsionne, se ploie,
Se cabre, se plie et virevolte, féline et capiteuse.
Scène inattendue dune hôtesse inconnue
Les regards étonnés se concentrent sur lheureuse
Souriant à la vie en cette transe émue.
Il la vue, reconnue, cette infante sauvage.
Lobservant tendrement du grand bar surpeuplé
Lhomme a senti en lui la force dun ravage
Immense, qui le secoue en son cur si troublé.
Cest la première fois que cette louve apparaît
Dans le décor pailleté où la musique disco
Senchaîne aux sons plus lents, romantiques ou discrets.
Mais déjà il ressent pour elle les violents flots
Dune attirance. Sembrasent alors lêtre charnel
Secrètement animal, exigeant, solitaire
Et son cur bohémien. Ô course de rebelle
Glanant le long des routes un destin de chimère !
Sirotant un alcool, s'exacerbe son ivresse.
Il scrute les moindres gestes d'une sensible danseuse
Aux seins ronds et moulés. Ô sensuelle diablesse
Dont les courbes de femme se balancent ! Ô faiseuse
De rêve en ses perles et satins, ses reins cambrés
Ses jambes fuselées perchées sur la conscience.
Son instinct abyssin le pousse à linviter
Dès les premières notes dune amoureuse danse
Câline, voluptueuse, le portant à flirter.
Il imagine cette rive, la serrer contre lui.
Voudra t-elle de ses ailes ? Pourra t-elle accepter
Cet amour foudroyant qui est né et qui luit ?
Ô merveille des soleils quand la passion émerge !
Il savoure déjà cette peau blanche et cette bouche
Cette douceur qui coule d'elle, exaltée en des berges
Où brûlent les diamants. Ô femme un peu farouche !
Il espère lui voler quelque baiser furtif
Dans le cou, sur la joue ou si près de ses lèvres
Ourlées, acidulées, inspirant un lascif
Et long souffle vers cette biche ! Ô vertige de fièvre !
L'ardeur monte par saccades d'un nomade épris.
Il ne peut résister à cette vision si claire
D'une magicienne pulpeuse aux fesses rebondies.
Sculpturale fée, de lui elle est digne et contraire.
Contraste radieux qui pourrait apparaître
S'il l'attire contre lui, si vif, au sein du bal.
Ces deux coeurs de tziganes sauront se reconnaître
Elle, si limpide et blonde, et lui sombre féal.
Bohémienne différente, elle est un songe vivant
Qui tangue en arabesques dans l'espace conquis.
Son visage scintillant veut asperger le temps
D'une eau vive dont les vagues sont la mer d'un esprit.
Elle roule dans son mystère. S'enorgueillit son sang
En des volutes tribales, tempêtes provocantes.
Le mirage s'incruste dans ce port étonnant.
Parfois elle titube. Ô folie indécente !
L'ombre et la lumière pourront-elles fusionner ?
Les errants se bousculent dans ce bruyant chaos.
Tant de fougueux rivaux surgissent pour happer
Celle qui ne voit rien dans le brouillard si chaud.
Puis s'arrête son envol et, lasse, elle sest assise
A une petite table où elle se rafraîchit
De nectars très fruités. Son regard de marquise
Semble vague et songeur. Mais il pense, ébloui
Que cette ondine si singulière la envoûté.
Il se sent captivé par ses gestes de chat
Par cette allure suave, sa façon veloutée
Dêtre. Ô fresque si jolie pour ses yeux ! Ô bras
Quil veut délicatement saisir pour lenlacer !
Athlétique, l' homme en ses cheveux noirs, fier gitan
Regard qui étincelle, ne peut plus sarrêter
De cueillir la beauté, de respirer le chant
Léger et parfumé, de celle quil aime déjà.
Le hasard a parlé. Ô divine présence !
Rien ne pourrait le faire renoncer. Et là
Il va saisir une fleur qui brille de son essence.
Botticella
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