Tout à coup elle fut là, elle était là.
En fin dautomne je me sentais ouvert et doux, en attente dune aventure de hasard.
De mon banc de jardin, je lisais aux derniers rayons du soleil je ne sais plus quel bouquin, P. Djian, Platon, JMM Féraud, Confucius ou Pauzus. De temps à autre, je contemplais paisiblement le sommet vibratile de larbre semi dévêtu où roucoulait encore un couple de colombes si pures et si obsédées.
Jai tourné là tête, et elle était là.
Jamais je naurais su trouver sa trace à elle, aller à sa recherche, la sentir lentement, oser la déranger en son gîte. Cest elle qui est venue, trouillarde et audacieuse près du mien, reniflant dans le vent des effluves à explorer.
A peine lui ai-je proféré un mot doux, ai-je bougé un genou quelle sest enfuie. Elle se trouvait à grande distance.
Le lendemain je continuais de lire «Des souris et des hommes ». Les blanches colombes obsédées, plumées de lin candide, poursuivaient leurs affaires dans le charme. Un peu plus loin, les pies nuisibles en livrée de traders hurlaient comme eux leur assourdissante vulgarité.
Elle est revenue, ma renarde, silencieuse comme un mirage.
Le surlendemain, moi le petit Prince, jai entrepris de lapprivoiser, cétait ce quelle me demandait.
Jai ciselé de petits cubes de gruyère, aussi tendrement fabriqués quune sublime cuisine de mères lyonnaises.
Elle est revenue. Je lai attirée : même contre nature, elle me voulait bien. Je lui jetais, je lui offrais mes petits bouts de clins dil de plus en plus près. Vous le croirez ou non : elle fermait un il en mobservant.
De jour en jour, de soir en soir, elle sapproche. Nos séductions fonctionnent malgré nos peurs.
Cette apparition silencieuse, ce rendez-vous secret entre chien et loup mémerveillent.
30 mètres, elle grignote, 10 mètres, 5 mètres, 2 mètres, elle grignote mes minuscules liens dattirance. Elle me regarde dans les yeux, recule dès que je lui dis « viens ! »
Mon but est de parvenir à la toucher une fois, voire à la caresser toujours.
Elle était presque à portée de ma main là, dégustant ces petits bouts de désir que je lui proposais.
Je nai jamais pu effleurer sa fourrure. Je ne lai jamais revue.
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