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Le sourire des culs (18) par Zetino

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Dans l’appartement de son amant, Lise Emoix ne put s’empêcher d’en détailler le contenu. Réflexe professionnel. Une observation discrète et rapide. Elle constata ainsi que tout y était soigneusement bien rangé. Chaque chose se trouvait à sa place. Pas de doute, c’est un maniaque de l’ordre et de la propreté, se dit-elle. L’idée saugrenue de tomber sur un quelconque couteau lui traversa l’esprit l’espace d’une seconde. Mais elle se ravisa aussitôt, sous la pression turgescente de Broche qui la poussait délicatement vers la chambre. - C’est propre, chez toi. Et bien rangé pour un célibataire. - Ma chère féministe, sache que tous les hommes célibataires ne vivent pas dans la crasse et le désordre en attendant de trouver une esclave pour s’occuper du ménage. - Heureusement… Hé ! Fais attention à ma robe, voyons. Les bretelles sont fragiles. - Excuse-moi. Mais tu es si excitante, toute enrobée dans ce bout de ciel bleu… Bon sang ! Comment as-tu fait pour entrer là-dedans ? - Attends. Je vais l’enlever. Tu vas finir par me la déchirer. - Hm… Ils sont adorables, ces sous-vêtements… - Tu aimes ? - Oh oui… Tourne-toi, pour voir ? Houlà… Et terriblement sexy… Lui tournant le dos, elle avisa sous l’oreiller un foulard bleu qui pendait sur le côté. - Dis donc… Mais tu es vraiment un fétichiste, alors, ou quoi ? Qu’est-ce que tu caches, là ? Oh, le joli foulard en soie… C’est toi qui portes ce genre de chose, ou bien tu comptais me l’offrir ? Tiens, il est parfumé au jasmin… - C’est une copine qui a dû l’oublier… Tu ne vas pas m’arrêter parce que je vois d’autres femmes ? - Dans les autres pièces, c’est légal. Mais dans ta chambre… - Jalouse… Et si tu me bandais les yeux avec ? C’est classique, je te l’accorde, mais néanmoins efficace. - Et pourquoi ne pas faire l’amour normalement ? - C’est quoi, pour toi, faire l’amour normalement ? - Tu as vraiment besoin de tout ce cinéma pour me faire l’amour ? Je ne te suffis pas ? - Mais si, ma sirène bleue. Tu me combles largement par ta simple présence. Et même ton absence me fait de l’effet, si tu veux le savoir. Mais on aura bien le temps de faire l’amour normalement lorsqu’on sera vieux et perclus de rhumatismes, non ? - C’est gai… - Allez ! Bande-moi les yeux. L’inspectrice Emoix s’exécuta, puis le déshabilla lentement. Satisfaite de l’érection qui l’attendait, elle caressa son corps, baisa, lécha et prodigua maintes sucions durant quelques minutes. Ensuite elle fouilla dans son sac à la recherche d’un préservatif pour en recouvrir le sexe impatient. - Encore, supplia Broche d’une petite voix. - Puisque tu ne veux rien voir, maintenant, moi, je ne veux rien savoir. Elle aida son amant à se coucher sur le lit. L’embrassa à pleine bouche et saisit son pénis pour jouer avec. Elle le frottait doucement contre ses seins, son ventre, l’intérieur de ses cuisses, de ses petites lèvres, puis son clitoris, l’enfonçant de temps à autre tout au fond de son vagin avant de le ressortir aussitôt. Lentement. Au bout de quelques minutes, elle se décida à garder le sexe de Broche en elle, contractant les muscles de ses parois vaginales tel un serpent entourant sa proie, secouant parfois ses hanches par saccades, d’abord lentement, ensuite de plus en plus vite. Leurs respirations s’accordaient. Leurs gémissements étouffés s’harmonisaient. Les peaux transpiraient. Les corps se collaient. Et bientôt tous deux jouirent dans la joie de cet instant de bonheur universel et cathartique. Vint ensuite le moment où, selon l’usage, les deux amants en fleur, encore essoufflés et repus d’amour, hésitants entre le sourire béat du bien-être et le sérieux de la conscience amoureuse, s’évertuent à se chercher mutuellement, longuement et tendrement au fond des yeux le mystère de leur passion. Ainsi Lise lui retirait déjà le foulard, et s’apprêtait à faire de même avec le préservatif, lorsque la sonnerie d’un téléphone portable interrompit son élan. Á son appel, venant du fond du sac, la policière reprit ses dispositions. Broche souleva ses paupières et saisit un mouchoir en papier pour enlever proprement le bout de latex. Lise se rhabillait à la hâte tout en répondant vaguement par des oui, des mais non, et conclut la conversation par un d’accord, j’arrive. Ensuite elle chaussa ses escarpins lapis-lazulis. C’était mon collègue, expliqua-t-elle. Désolée, mais il faut que je repasse au commissariat. Elle s’agenouilla sur le lit pour déposer quelques bisous sur le ventre docile de son amant immobile, qui ne savait trop quoi penser ni quoi dire. L’inspectrice constata que le pénis s’affaissait tristement sur ses testicules. Elle chercha furtivement des yeux le préservatif avec une vague intention, mais n’en vit pas la moindre trace – Broche tenait encore le mouchoir dans son poing fermé. Une fois debout, elle lui adressa un petit signe de la main accompagné d’un tendre sourire. Il l’interpella alors qu’elle passait le seuil de la chambre : - Lise ! - Oui ? - Non… rien… - Houlà, comme ce rien contient beaucoup… - Je voudrais te dire des choses. Mais je ne suis pas sûr que tu comprendrais. Et je ne suis pas certain d’être prêt à te les dire. - Ah ? Eh bien, quand tu seras prêt, tu me le dis. D’accord ? - D’accord. - Bon ! Je dois y aller. On m’attend… - On se revoit bientôt ? - Je t’appelle. L’inspectrice s’en alla sans autre explication, et dévalait déjà les escaliers en s’interrogeant gravement sur ces choses que son amant n’avait pas pu lui révéler. Que devait-elle comprendre ? Elle n’osait se l’imaginer. Pendant ce temps, Broche se soumettait également à la question : s’agissait-il de l’affaire ? Ils ont peut-être appris quelque chose au sujet du tueur… Á peine avait-il terminé sa phrase qu’une décharge de lucidité fit sursauter sa conscience : Mais qu’est-ce que tu racontes ? Tu dérailles, mon vieux. Ça ne va pas du tout, là. C'est toi, le tueur... Il faut vraiment que tu te fasses soigner. Va voir un psychiatre, putain ! Oui, bien sûr, répondit-il en ricanant. En plus, s’est remboursé par la sécurité sociale… Et il se leva, le rire aux tripes.

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