Avoir pu atteindre le lac Baïkal et concrétiser enfin un vieux rêve fut pour moi un vrai bonheur. Ce type de voyage, que lon ne réalise quune fois dans sa vie, fait partie des épisodes forts qui jalonnent lexistence.
Pour des raisons très diverses, peu de personnes choisissent cette destination, surtout en période hivernale.
Il faut bien sûr, en tout premier lieu, aimer la nature à létat sauvage et les variations de température parfois spectaculaires. Il faut, si possible, partir accompagné, sauf si lon est un solitaire invétéré, capable notamment de sadapter à des situations plus ou moins inattendues, à commencer par arriver à se faire comprendre. Il faut être à la recherche du vrai dépaysement et surtout en capacité de recevoir, dapprécier les effets bénéfiques produits par le Baïkal.
Reste ensuite à régler les détails matériels : coût de lhébergement sur place (Tout le monde ne sappelle pas Sylvain Tesson !) et les frais de transports. Les individus les plus entraînés ou les plus endurants pourront faire le trajet plus de 8000 km à bicyclette ou à dos de mulet après avoir obtenu un congé sabbatique ou une retraite très anticipée ! A noter au passage que le voyage en avion nest pas très coûteux (pour linstant, tant que le prix du kérosène nexplose pas !) et pas vraiment écologique. Mais il est possible de faire, par exemple, le trajet retour par le Transsibérien dont le tarif reste abordable. La 3ème classe/platskarny, qui nexiste que sur le Transsibérien, est une voiture-dortoir sans compartiment, celle de Mme ou Mr tout le monde. Le billet coûte la moitié de celui dune 2ème classe/kupeyny (kupe) ou classe standard, qui comporte 4 couchettes par compartiment et une table pliante
(α)
Mais lessentiel, à mon sens, avant de se lancer dans un tel périple est dêtre prêt au niveau mental, au niveau psychologique. Si vous allez là-bas simplement par curiosité - comme vous le feriez pour voir le lac Tanganyika ou le lac Titicaca ou encore avec lidée de faire du patin à glace sur la plus grande patinoire du monde il est inutile de parcourir autant de km. En France, nimporte quel lac alpin ou pyrénéen dorigine glaciaire fera laffaire ! Car leffet que produit sur un individu le Baïkal est unique. Il faut donc au préalable être prêt à vider votre cerveau. Eliminer, éjecter tout ce qui pourrait restreindre votre concentration et donc votre capacité à recevoir ce que le Baïkal - et lui seul peut vous transmettre. Si vous êtes dans un état de forte réceptivité et si vous prenez le temps de lobserver, de lécouter, à son contact en marchant sur la glace vous vivrez un instant magique. Le Baïkal vit et accumule depuis 25 millions dannées une quantité énorme dénergie. Si vous parvenez à être en symbiose avec lui, vous pourrez capter une infime partie de lénergie quil recèle. Suffisamment pour en revenir non seulement émerveillé mais transformé, régénéré.
Je suis revenu métamorphosé de mon escapade au lac Baïkal. Cette osmose ma permis de vivre un intense moment de bien-être. Ce phénomène magique opère encore en moi. Il mapporte toujours réconfort et plénitude, alors quil sest écoulé près de 2 semaines depuis mon départ dIrkoutsk. Quelque chose de très fort sest passé dans ma tête : transfert dénergie, choc émotionnel ? Ce que je sais, cest que limage du Baïkal restera imprimée durablement sur mon cortex. Demain ou après-demain, il me faudra retomber sur ma terre natale car, tout en écrivant ici, je suis toujours là-bas
Je marche maladroitement sur cette immensité glacée comme un très jeune enfant découvrant les lois de la gravité. La couche dun mètre de glace qui recouvre la surface est striée de cassures qui feuillètent lépaisseur dun réseau de veinures. Une merveille !
Le Baïkal est vraiment unique et il se mérite. En allant sur les hauteurs de la petite île de Zamogoy, située dans ce que les Bouriates appellent la petite mer du Baïkal, jai découvert un stupa. Cest un monument bouddhiste où lon vient se recueillir et faire un vu. Bien incapable datteindre, en ce lieu, le nirvâna, jai remercié simplement le ciel de mavoir permis de réaliser mon rêve. Je sais maintenant que face aux vicissitudes de lexistence, jaurai plus de force quauparavant et que jaffronterai encore mieux les situations particulièrement difficiles.
Ainsi, maintenant, pour prévenir un coup de blues, mon antidote sera de faire abstraction - durant quelques instants - de tout ce qui mentoure puis de me faire une petite séance de Baïkal. Voir, revoir toutes les photographies faites lors de cette escapade en Sibérie orientale. Même si Sylvain Tesson prétend que : « Penser quil faudrait le prendre en photo [le lac] est le meilleur moyen de tuer lintensité dun moment » (β), limage est un moyen puissant pour se souvenir et surtout pour donner aux autres lenvie de parcourir 8 (heure dhiver) ou 7 (heure dété) fuseaux horaires
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La vie est un long chemin, avec ses lignes droites, ses détours, ses brumes, ses soleils, ses orages
Et parfois, il y a même des arcs-en-ciel. Jai vu les brumes, les soleils du Baïkal. Et le Baïkal est à présent mon arc-en-ciel, mon étoile. Paraphrasant Antoine de Saint-Exupéry dans Vol de nuit, je dirai que jai attendu le Baïkal [lescale] comme une terre promise et jai cherché ma vérité dans cette immensité [les étoiles].
Un grand merci à Eva stellaby, Pierre et babaka qui ont partagé avec moi ces instants merveilleux.
Une recommandation : choisir plutôt la mi-mars pour vous rendre au lac Baïkal. Le jour, les températures sont supportables et, sous les rayons du soleil, le lac gelé est superbe. En été, non seulement il ressemble à presque toutes les étendues deau présentes sur la planète mais surtout il ne permet pas de vivre, de ressentir cette transformation, cette sensation de bien-être.
Un dernier conseil : plutôt que de séjourner en bordure du lac, se diriger plutôt vers lîle dOlkhon (la plus importante en superficie) et vous rendre au village de Khoujir chez Lyda. Vous trouverez dans son établissement style pension de famille le meilleur accueil (http://www.baikal-terra.ru).
alioth
« L'amour est la plus universelle, la plus formidable et la plus mystérieuse des énergies cosmiques ».
Pierre Teilhard de Chardin (01 Mai 1881 - 10 Avril 1955)
(α) je parlerai du voyage dans le Transsibérien dans un prochain commentaire.
(β) Extrait page 178 de « Dans les forêts de Sibérie » édition nrf Gallimard 2011.
Le commentaire du 28-02-2012 : « Des rives du Baïkal à Nijni Novgorod » hommage à Anton Tchékhov
http://www.pointscommuns.com/tchekhov-commentaire-lecture-101645.html
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