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Maître ou pas maître, telle est la question par Sablaise1

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Eté 2010. Depuis le temps que je rêvais d’habiter tout près de la mer, j’avais enfin trouvé une opportunité : une petite maison délabrée vendue au prix du terrain, qu’il fallait démolir pour reconstruire. Plusieurs amis, dont un connu sur PCC, m’ont aussitôt mise en garde : « est-ce que tu réalises bien dans quoi tu t’engages toute seule ? ». Je n’ai écouté personne et je me suis lancée. Tout a très mal commencé. L’ancien propriétaire, malade d’Alzheimer, était sous tutelle et la vente devait passer par un juge submergé de dossiers en instance. Je n’ai pu acheter le terrain qu’en janvier 2011, déjà six mois de perdus. Entre temps j’avais trouvé une entreprise de bâtiment et c’est à ce moment précis que j’ai cessé d’être une retraitée zen pour me transformer en maître d’ouvrage stressé. D’emblée la mairie m’a fait entièrement remanier mon projet pour qu’il colle avec le plan d’occupation des sols. Lorsque j’ai enfin eu le permis de construire on s’est aperçu qu’il y avait de l’amiante partout dans la vieille bicoque. Pour pouvoir l’enlever avant de démolir, il a fallu contacter neuf organismes différents et attendre leur réponse. Quand j’ai eu l’autorisation de désamianter c’était l’été 2011 et toutes les entreprises prenaient leurs congés. Une année entière perdue en démarches administratives… A l’automne 2011 la démolition a commencé, suivie de la construction, et c’est à ce moment-là que j’ai compris pourquoi on avait essayé de me dissuader. Pas un jour depuis je n’ai eu l’esprit en paix. Pas un jour depuis je n’ai pris connaissance sans appréhension de mes mails, messages téléphoniques et lettres. Parce que tous les jours ou presque il y a une surprise, rarement bonne, souvent plusieurs. Avenants coûteux pour des prestations oubliées, difficultés techniques à résoudre, malfaçons découvertes sur le chantier se succèdent au quotidien. En fait je ne me sens bien que le dimanche et les jours fériés parce qu’ils sont tous en congé. Et encore, c’est bien un dimanche qu’en allant faire un tour sur place j’ai vu un geyser sur le trottoir, ma conduite d’eau qui fuyait… Sans parler des démarches interminables pour avoir tous les branchements. Ni des conflits avec les voisins, mon chantier jouxtant une impasse privée dont les propriétaires refusent le passage des engins. Ni des délais qui ne cessent de s’allonger, je devrais déjà avoir emménagé, alors que j’ai une date butoir pour quitter ma maison actuelle. Soucis de nantie me direz-vous et vous aurez raison, car avoir une maison à soi quand on a une retraite modeste est une grande chance. N’empêche cela fait bientôt deux ans que je patauge dans les démarches administratives et les problèmes techniques, moi qui n’aime rien tant que planer, et ce n’est pas fini ! Alors j’attends impatiemment le jour où je pourrai abandonner définitivement la maîtrise d’ouvrage et retrouver la maîtrise de moi-même. Quant aux amis, ils ironisent à qui mieux mieux: « On t’avait prévenue, t’avais qu’à nous écouter ! »

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