Que le maître soit philanthrope, bienveillant
Lenfant voit souvrir des horizons inconnus
Que le maître soit despote, méchant
Lenfant à jamais demeurera obtus
Un enfant tout comme un autre éveillé
Etait le souffre-douleur de son mentor
Qui navait cesse de lhumilier et le railler
Pour lappoltronner mieux encore
Pour un bouton décousu sur sa camisole
Pour le sens oublié du mot mascaret
Il finissait au froid dans la cour de lécole
Attendant que la cloche vienne le délivrer
Dans son rôle de persécuteur, le maître sasseyait
Aux repas tout près de lenfant blême
Et, laccusant de bruits incongrus, lui lançait :
« Un enfant bien élevé ne rote pas la bouche pleine ! »
Lenfant détesta bientôt létude et prit situation
Il se fit postillon, achemina colis et messages
Heureux déchapper à toute domination
Enfin seul avec sa monture et son attelage
Devenu vieillard cacochyme, le maître
Dans une ruelle, entouré de malandrins
Voyant au lointain un coche apparaître
Crut pouvoir échapper à son cruel destin
Las! sur son cheval le cancre moqueur
Passa sans lui prêter aucun secours
« Vieillard tu me fis vivre dans la peur,
Aujourdhui est enfin venu ton tour ! »
Nul ne sait si avant de mourir égorgé
Tandis quon lui volait son or
Le maître se souvint de sa sévérité
Et en eut du remords
Que les puissants daujourdhui
Se gardent de tous les abus
Demain peut les trouver démunis
En grand besoin dêtre secourus
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