Que veux-tu....-ce nest pas une question, cest un soupir. Je te dis « que veux-tu » comme je pourrais aussi bien dire on ne peut rien.- Le mal est fait, cest comme ça. On ne peut rien.
Non, on ny pourra rien changer. Les choses sont ce quelles sont. Une bonne fois pour toutes, tu dois bien rentrer ça dans ta caboche, petit ! les choses sont ce quelles sont. Elles ne nous appartiennent pas et nous navons sur elles aucun pouvoir, et daucune sorte. Combien de fois encore faudra-t-il te le répéter ? Les choses sont bien là autour de nous. Elles vont, elles viennent, un peu au hasard, parfois juste assez organisées en apparence pour quon y croit, pour quon les croit vraies. Alors que tout nest quillusion. Tu le sais bien que les choses ne suivent que leur penchant à elles.
Il y a le réveil qui na pas sonné. La tartine de pain beurrée tombée forcément du mauvais côté. Le bus qui démarre devant toi. Les portes de lascenseur qui se referment sous ton nez. La voiture emportée par la fourrière alors que tu avais enfin dégoté une petite place pénarde (que tu croyais !) et ton portable disparu corps et biens depuis deux jours. Tous ces objets perdus ou évanouis comme dans un trou noir, au fil du temps...que tu ne retrouveras jamais. Ou bien si, peut-être, un jour, par hasard .....Sans parler de ton doublement- cher ordinateur qui tire le rideau la veille du jour où tu dois sans délai rendre un rapport dimportance ! Non décidément, tu ne dois pas compter sur les choses ! Elles ne sont pas fiables.
Cest comme ça. Ah ton air étonné et abattu de victime innocente. Tu sembles découvrir à chaque nouvel incident lindépendance et la rébellion des objets. Ils nen font quà leur tête et alors ?
Si ça se trouve, eux-mêmes sont soumis. A dieu sait quelle force supérieure ou champ magnétique qui les déplace, les pousse, les change de place, les corrompt et les manipule ? Sans doute les choses ne sont-elles pas plus autonomes que nous-mêmes ? Elles sinterrogent peut-être même sur le fait que toi tu les abandonnes ? Va savoir.....
Mais quand même ! A y bien réfléchir....Tu veux que je te dise ? Ce que je pense en vérité cest que « les objets n'ont pas d'autre existence que celle que nous leur donnons » » Les objets n'ont pas d'âme, mais nous passons notre temps à leur en donner. » Regarde, cet amour, cet attachement du bébé au Doudou, de l'épousée à son anneau, et le tien, obsessionnel, à ta voiture même ! Ta peur de les perdre. Ta fébrilité à les retrouver. Cette passion que tu y mets ! Tu nas quà te regarder faire avec ta nouvelle tablette ou ton tout dernier e-machin, ils sont devenus comme le prolongement de toi-même, pauvre de toi, avec eux, tu trompes ton angoisse et ta solitude, tu te crois relié au monde, tu te prendrais même pour dieu que cela ne métonnerait pas !
En bref, tu colmates tes angoisses avec tous ces objets, tu règles tes conflits. Elle est bien là, lâme des objets, en toi tout bonnement ! Et tu peux les rendre ordinaires ou les poétiser -déjà Lamartine s'interrogeait, souviens-toi, "Objets inanimés avez-vous donc une âme" -selon ton choix ! Cest toi le peintre, en somme... de ton propre tableau !
Allez, redescends donc sur terre petit ! ..... et si tu nous racontais plutôt lhistoire de ce fauteuil à bascule* qui appartenait à ton père, et tout ce que tu y as mis dedans ?
Ce serait vraiment de ton histoire à toi ..... et de ton âme... dont tu nous parlerais...
Ton "Rosebud" secret ....
* (celui du père de Sablaise par exemple ...et au hasard)
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