Je n'ai pas le moral, j'ai accompagné cette amie malade qui se battait contre cette saloperie de cancer du pancreas depuis 7 mois.
elle a eu bien des misères. elle s'est battue , sans une plainte, a subi traitement , immobilisation, sans une rebellion.
Elle etait depuis 15 jours en soins palliatifs et voici que son état s'est trés vite dégradé.
en moins d'une semaine.
elle a tellement faibli que jeudi nous ne pouvions plus comprendre ce qu'elle nous disait ou si mal, et pourtant elle n'arrêtait pas de vouloir communiquer. Elle avait soif, elle demandait des tas de choses.
Samedi ce fut un jour funeste, nous l'avons retrouvé en agonie...Son visage était un masque blafard, elle avait pris 20 ans, elle gisait sans tonus sur son lit de souffrance mais elle était là, elle réagissait aux voix, au toucher.
Pas facile, nous devions porter blouse, masque et gants, ça génère une barrière dont nous nous serions passées et on ne saura même jamais pourquoi il nous fut nécessaire de porter tout cela...
Secret médical ...
Le jeudi je lui avais dit quand même tu pousses là tu nous obliges à nous déguiser, mais qu'est ce qu'on ne ferait pas pour toi n'est ce pas...Pas facile de rester légère affublée de la sorte.
Hier après midi, je l'ai trouvé fraîche et reposée, bien relevée dans son lit, bien coiffée. La tête un peu en avant elle dormait.
Son après midi a été une alternance d'éveil, de pauses respiratoires, de râles...
Sa famille était près d'elle.
Nous somme revenus le soir, elle était seule contre toute attente et pas bien du tout. Prostrée, elle n'arrêtait pas de geindre, seule dans la chambre a peine éclairée, son visage livide était celui des dernières heures.
Nous l'avons cajolé comme un petit enfant, caressé son visage ses cheveux, lui avons tenu la main, lui avons raconté notre journée, dans le monde, là dehors...elle adorait qu'on lui parle de la vie, celle qu'elle pensait n'avoir mis qu'en parenthèse.
Elle avait tellement de mal à admettre que cette maladie allait avoir sa peau.
Elle avait tellement combattu dans sa chienne de vie ou rien ne lui fut épargné que ça aussi elle pensait être assez forte pour le vaincre...
Alors nous lui avons aussi redit qu'elle pouvait poser les armes, que cet ennemi là était bien trop fort, qu'il fallait partir, aller vers la Lumière..
Nous avons parlé de Chartres et de cette maie qui y était là faire brûler des cierges à sa demande et venait de lui rapporter une petite statuette de la Vierge Noire du Pilier. Nous lui avons mise dans la main, elle a serré sa main dessus...Elle était indéniablement toujours là.
Ses pieds étaient glacés, l'oedeme ne les quittait plus mais nous avions apporté des chaussettes que le personnel ne lui avait pas remis. Il arrive un stade où l'on nous fait comprendre que "ça ne sert plus à rien" mais je refuse, rien est anodin dans ces moments là et trop de douceur ne saurait nuire. Moi je déteste avoir trés froid au pied, je ne parviens pas à m'endormir...C'était des chaussettes que l'on donne chez AF pour les longues distances, légères, chaudes, ne générant pas de compression, je les ai retrouvées et doucement je l'en chaussais sans savoir que ce vol de nuit dont elle gardait scellés derrière tes lèvres sèches le numéro et la destination, l'emporterait long de nous et qu'il ne fallait surtout pas qu'elle le rate.
Sa respiration s'est calmé, elle avait en fait quasiment cessé de geindre dès que nous nous étions installées à ses côtés, appuyées sur les barrières comme sur les bords d'un improbable berceau .
Il y eut un petit filet de souffle tranquille, tandis que mon amie continuait son doux monologue et que je lui caressais la main. comme si elle s'assoupissait doucement et puis, regards écarquillés et incrédules au dessus de nos masques...Plus de souffle, non...plus rien...
Notre amie est morte comme s'endort un petit enfant.
Entre ces deux copines qui quelques semaines auparavant encore auraient improvisé n'importe quoi pour la faire sourire...tout était bon pour apporter le rire et l'humour entre les murs tristes de sa chambre d'alors.
Elle laisse une jeune fille de 19 ans qui ne connait pas son géniteur et se sent seule au monde, sa souffrance je ne saurais l'oublier, pas plus que ses cris, cette nuit dans l'anonymat du service !
Les cris de cette pauvre enfant ont déchiré la nuit et tout s'est figé ! Tous ceux qui sont là attendent la mort, le remue ménage les intriguaient, tout le monde était réveillé, qui grognant, couinant, râlant et là, ils ont compris.
Un grand silence s'est abattu et c'était épouvantable, une toute petite fille hurlait et voulait qu'on lui rende sa maman...
Le corps ne doit pas rester plus de deux heures dans la chambre post mortem.
Il a fallu d'abord attendre le constat du médecin, puis le coup de fil à la famille et enfin la toilette avant de retrouver notre pauvre petit oiseau bien apprêté.
Pendant tout ce temps ou nous ne pouvions l'approcher mon amie a été prise d'un fou rire incoercible et communicatif dans la cuisine dont nous avons fermé la porte. Nous venions de vivre quelque chose de doux et pourtant violent à la fois, les réactions sont parfois surprenantes et les nerfs tombent...Nous nous sommes calmées dans l'air glacial d'un parking où rodaient quelques chats, je les ai remarqués sans les voir, je m'en souviens maintenant.
L'équipe de nuit a été vraiment gentille et a laissé du temps à la famille, pour se recueillir , souffler, pleurer, crier, boire un thé, revenir, prendre l'air, revenir encore...Ces gens là sont formés et vraiment ont été on ne peut plus empathiques.
Puis ce fut le moment de la laisser partir pour la grande et froide soute où l'on range les candidats au long courrier sans retour. Pour tous bagages son linceul, on voyage léger dans cette compagnie là.
Quant à ses affaires personnelles, nous avons du les regrouper sur le champ pour vider la chambre...pas facile de vivre tout ça en quelques heures...
Le temps du retour, au pilote automatique, de tourner un peu en rond, se dire "waoooooo"...j'ai fermé les yeux vers 5h30 !
Ce soir je suis comme saoule, je ne sais plus, j'ai froid, je suis fatiguée, je manque de sommeil mais je n'arrive pas à fermer l'oeil.
Pourtant je suis contente que cette amie soit partie apaisée avec nous et tout en sérénité, il était grand temps qu'elle accepte de partir.
Je pense que elle m'a inconsciemment beaucoup pris d'énergie ses derniers temps, je n'étais pas étanche je le sais.Il faut que je récupère !
Je ne sais pas pourquoi je vous raconte tout ça...mais voilà !
En même temps pas envie de trop en parler pour de vrai, avec ma voix qui s'est brisée sur le froid de cette nuit...J'ai prévenu par email, par texto, je n'ai eu le courage que de répondre à de rares coups de fil d' ami-e-s communs.
Quand je pense au commentaire sur les fakes, les fuck , aux funambules grimés de la toile, de gens qui se cachent derrière des pseudos parce que mon Dieu voyons voir pour dire des choses osées il vaut mieux etre un homme et pour connaitre les modes d'approches de mes prochains draguons sous un pseudo féminin, et que je tembrouille et que comme personne ne me lit je me crée des clones qui m'autocensurent, m'autosatisfont, m'autoflagellent, m'autoencensent...et m'autodétruisent par tous ces mensongent qui m'autofarcissent la cervelle à suivre les fils...
Que tout cela m'est étranger !
J'avance dans la vie avec mon coeur grand ouvert ...
ça me vaut des griffes et quelques beignes...mais tellement, tellement d'émotions, d'instants précieux, de belles rencontres que pour rien au monde je ne changerais...
Pour tout vous dire toute cette masturbation pseudo intellectuelle m'emmerde...
Si vous saviez comment la vie est dure mais belle, mais dure mais BELLE... quand on la vit en vrai, sans faux semblants...
Et que les putains d'expériences qui émaillent une vie digne de ce nom ne se font pas derrière un masque .
Comme nous détestions toutes les deux l'hypocrisie et les faux semblants et comme tu me manques déjà Pascale !
Combien nous en aurions ri de ces réactions si futiles si tu avais encore été en état d'en rire !
Dans vol , il y a vol...Voler comme les oiseaux et voler comme dérober...Toi l'oiseau, nous les lésées...
Ce soir tous les miroirs sont voilés, même ceux de mes yeux !
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