On l'avait découverte il y a quelques années avec ses deux premiers albums " Milk- Eyed Mender" et "Ys".
D'emblée, la jeune Joanna nous proposait une musique atypique, certes teintée de folk, mais une folk à des milliards de lieue de ses consoeurs de Nevada City Alela Diane et Mariee Sioux. En effet, Joanna Newsom ne manie ni ni le banjo ni la guitare sèche comme on aurait pu s'y attendre, mais la harpe , fait assez rare en musique pour le souligner, et le piano . De plus, sa voix si singulière est en soi un instrument tant elle sonne de manière particulière, un mélange à la fois de jeune enfant et de porte stridente . Enfin les morceaux eux-mêmes par leur texte, leur longueur la rendaient inclassable.
Bref, l'on s'était empressé de ranger cette belle frangée très vite sous une étiquette de psyché folk, soeur lointaine d'un Devendra Banhardt ou des Animal collective à leurs débuts.
Ainsi, la jeune Joanna avait donné naissance tout autant à une horde de détracteurs hermétiques à ses miaulements qu'à une meute de fans accrocs à ses jupons médiévaux et ses longs cheveux blonds.
2010 , la demoiselle a bien grandi et nous propose un très attendu 3e album :" "Have One On Me". L'opération marketing autour de la sortie de ce nouvel album donnait déjà la couleur. Out les tenues dignes de la Fête du Roi de l'Oiseau du Puy, out la grosse frange d'adolescente, place à une jeune femme sexy aux robes ultra flatteuses. L'elfe a laissé place désormais à la sorcière et gare à vous les mecs ! Le changement n'a pas seulement été physique, la voix s'est également énormément modifiée. Exit les envolées stridentes qui décourageaient plus d'un auditeur, désormais la voix plus ronde et chaude se veut charmeuse.
C'est donc avec un grand point d'interrogation dans la tête je me rendis à Feyzin hier soir assister à son concert. Premier étonnement : il y a du monde ! ( Faut dire que pour la plupart vous ne connaissez pas Feyzin et sa merveilleuse Epicerie Moderne à laquelle on accède après un trajet par l'autoroute et un passage par derrière une énorme raffinerie de pétrole... en gros vous savez que vous êtes à Feyzin à l'odeur et la vue des cheminées... alors une harpiste californienne aux tenues médiévales au milieu de tout ça...).
Deuxième étonnement : lorsque la Joanna déboule sur la scène, sifflet général des mecs ( très nombreux) de la salle : la belle avait revêtu une robe vaporeuse grise décolletée et des escarpins verts que je n'aurais pas reniés ( bon faut dire que chuis une fille et que ben oui on est sensibles à ce genre de choses). Mon voisin me souffle alors, conquis : " c'que c'est phallique une harpe "... Glups.
La belle cédant aux sirènes du marketing, aurait-elle perdu sa fraiche candeur qui faisait toute sa musique ? Aurait-elle effacé les charmants défauts qui la rendaient unique ? Aurait-elle laissé son âme au vestiaire au profit d'une paire de Louboutin?
Heureusement, le concert démarre et les doutes s'envolent vite au profit de jolies surprises. Joanna Newsom a quitté sa peau d'enfant. La nouvelle femme ne minaude plus mais désormais chante... et très bien ! A diverses reprises, on songe à Björk avec qui elle a collaboré mais aussi à Kate Bush.Les arrangements de ses morceaux se sont également enrichis, épaissis, servis par un groupe de musiciens experts dans l'art d'ajouter des touches ici et là.
Le public conquis demeure silencieux durant les morceaux... on se croirait à l'opéra .. au point que Joanna Newsom s'exclame à un moment " Why do'nt you say anything?".
2 rappels et puis s 'en va... et hop retour à la raffinerie, les cheminées, l'autoroute, que Joanna la magicienne nous avait fait oublier durant 2 heures au profit de ses paysages oniriques si enchanteurs.
"Go to sleep
You stunning sky
Gently creep
Cunning by
Quiet hum
Is amplified
By your thumb
That you suck dry"
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