L'heure bâtarde s'achevait bien au delà de son temps imparti, elle m'avait livré son lot d'imprévus et me laissait retourner chez moi dans la nuit et l'indifférence de la ville qui s'était endormie.
Pris dans mes frasques nocturnes j'avais raté le passage du marchand de sable.
Arrivé à la maison sans plus tarder je me glissais dans les draps, bras écartés pour accueillir Morphée au plus vite, ne doutant pas quUlysse reviendrait me jouer un air de flûte de son nuage en polyéthylène.
A peine couché les cris caverneux d'un ours en peluche sous le lit me firent me relever, histoire que je me prenne les pieds dans la carpette et que je m'assomme contre la table de chevet.
Le temps se mit à tourner en spirales me noyant dans un damier mouvant ses carrés noirs et blancs il m'aspira irrésistiblement me vidant de toute ma raison et mattira sous le sommier.
Petit Tom était là tel qu il y a un demi siècle je l'avais remisé sous mon lit, enfin un autre lit.
Pas rancunier Il me tendit la main pour que je le suive. Il n'avait pas pris une ride, ses yeux de verre étaient toujours malicieux et brillaient dans lobscurité. Le poil bouclé brun clair de son corps et teinté de blanc aux extrémités de ses pattes avait encore cette douceur cajolante quil mavait dispensée contre mes joues pendant quelques années.
Il avait bataillé dur pendant toutes ces années doubli mis pèle mêle dans la boite à souvenirs ancrée au plus profond dune vie dadulte.
Dans cette lutte pour revenir au premier plan il avait rivalisé avec des trains électriques, des voitures lancées à toute vitesse sur des pistes tortueuses, affronté la faune dune piste aux étoiles, et le plus difficile fut de distancer les mobylettes et de couper le son des électrophones qui lavaient rendu malentendant.
Dans cette lutte intestine il avait perdu son petit panier dans lequel il avait placé ses oeufs de pâques qu'il m'avait offert lors de notre première rencontre.
Nous refîmes le chemin à lenvers, lentement nous remontions vers la source émotionnelle créatrice dunivers éphémères. Tout au long de ce voyage initiatique je revoyais mes chers disparus qui reprenaient vie et me souriaient contents de cette visite impromptue.
Nous avancions dans un tunnel guidés par une lumière au loin qui nous attiraient comme les papillons de nuit. Petit Tom était fier de raconter ma vie, cette vie qui lentement avait expulsé un adulte par la suture lambdoïde de son cocon . Avec force de détails et danecdotes, il me contait tout ce monde merveilleux que javais construit avec lui le soir en nous endormant lun contre lautre.
Puis vint le temps de lamertume et du reproche, le questionnement de labandon du pays de la tranquillité aux profits dhorizons en friches ne suffisant jamais à la peine de chaque jour, la condamnation et le reniement dune vie faite de douceurs et damour.
Plus nous nous rapprochions du gouffre de lumière, et plus il me serait la main et me tirait en avant. Je résistais sentant ma fin venir, sa force était sans limite et je senti une partie de moi-même sextirper de mon corps comme un pull lover tellement moulant que vous avez limpression de vous arracher la peau en lenlevant.
Du haut de mes quatre ans je me retrouvais entre petit Tom et un adulte qui navait jamais trouvé de réponse au sens de sa vie. Une séparation létale et inévitable mamenait à continuer ma route avec petit Tom, et je laissais la grande carcasse gisant au sol retourner dans les brumes dun monde qui nétait plus le mien.
Lcm
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