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Cétait une petite frappe, beau comme un ange qui naimait rien tant que butiner de filles en filles. Une vraie gueule damour, comme dans une chanson dEdith Piaf.
Le travail, ce nétait pas pour lui, trop fatigant, trop salissant. Trop tout ! ou pas assez. Alors il vivotait de petits larcins et se faisait léchanson des cadors du commerce illicite. Tantôt grand seigneur, quelques fois moins mais jamais désargenté car il bénéficiait toujours, dans les périodes peu fastes, des largesses des femmes de la famille, coupables surs et maman.
Je tentais de lui parler de droit chemin, dargent honnêtement gagné et il me riait au nez arrête ton char, tu me vois sur les chantiers ?
Ce dont il avait envie de me causer, cest, en vrac, de ce quil aimait :
Les belles bagnoles, les petites blondes peu farouches, les babalitos au rhum, les vacances à la mer, les bonbons à la réglisse, Jacques Brel et Jane Rhodes, la fameuse mezzo-soprano (là je ne crois pas que cest sa voix qui le chavirait, mais une photo delle quil avait vue
sa plastique irréprochable. Ne disait-on pas quelle était la Bardot de lopéra ? ).
Ce qui devait arriver, arriva. Les gendarmes étaient venus larrêter. Il est resté un mois en prison.
Le jour de son retour, je l'observais derrière la vitre de mon bureau, je ressentis la résonance de funestes augures.
Tous les hommes sétaient donné rendez-vous là, dans ce terrain vague, lespace pas vert de la cité. Et que je te congratule, et que je te complimente. Mohamed, en héros du jour, saluait comme sur une pathétique scène de théâtre.
Nous reprîmes nos conversations quotidiennes, il me racontait la taule comme une grande fresque. En peu de temps, il avait beaucoup appris, il était devenu plus dur.
Un jour je ne lai plus vu. Il était tombé, encore, de nouveau, inéluctablement. Son séjour à lombre a duré plus longtemps ; les histoires de carnets de chèque volés, ça ne pardonne pas.
Je ne lai pas revu. Il est mort le jour de sa libération, lirréversible était arrivé.
Sa mère était inconsolable, je lui rendais visite chaque jour et chaque jour je voyais la folie la gagner. Son fils avait été assassiné ! Démunie face à ce fantasme, à cours de paroles apaisantes et ne doutant de rien du haut de mes 25 ans, javais écrit à lElysée, Monsieur le Président de la République
Contre toute attente, mon courrier avait voyagé, au Ministère de la Justice puis à la prison dAurillac. Cest ainsi quun jour je reçus, de là-bas, lappel dune assistante sociale qui mexpliqua quun document très circonstancié avait été remis à la famille.
Nous lavons beaucoup cherché. Dans tous les tiroirs, de tous les meubles, et nous lavons trouvé dans le buffet de la salle à manger, au milieu dun incroyable bric à braque, papiers didentité, factures, boite de henné, écouvillons de toutes tailles, dessins denfant
un rapport relié noir où tout était raconté
la voiture volée, juste passé le porche de la prison, et le crash à peine 800 mètres plus loin, livresse de la liberté.
Tous les détails étaient consignés , laprès-midi a passé vite à expliquer cette tragédie à cette maman. Elle a beaucoup pleuré, je lai beaucoup embrassée. Mais je crois quelle en fut apaisée et quenfin son deuil, elle put le faire.
Depuis elle a rejoint son fils, Paix à leur âme !
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