Il était furieux de son coup de fil, non mais comment pouvait-on traiter les gens ainsi ? il n'en revenait pas et c'était moins deux qu'il se déplace directement pour lui dire en face
sa façon de penser.
Il se passa les mains dans les cheveux d'un geste brusque tout en jetant un coup d'oeil furtif à la jeune fille qui n'avait cessé de le dévisager tout au long de sa conversation.
Sa silhouette mince se dessinait sur le soleil qui déclinait, elle avait l'air un peu ailleurs, sa tête légèrement penchée sur le côté, ses longs cheveux blonds retombant en cascade sur ses frêles épaules.
Elle n'était pas spécialement jolie mais il y avait quelque chose de très touchant dans sa façon de se tenir là, comme si quelque chose était sur le point de se produire à chaque instant et qu'elle l'attendait là, sereine et confiante.
Il rangea son téléphone portable dans sa poche et hésita un moment. Cela faisait longtemps que son regard ne s'était pas posé sur une jeune fille, encore meurtri de sa précédente histoire qui s'était terminé dans le silence et le coeur brisé.
Ses yeux se voilèrent un instant à cette douloureuse réminiscence. Combien de nuits avait-il passé depuis les yeux grands ouverts dans l'obscurité à fixer son plafond, le coeur lourd de chagrin et le corps destitué de tout désir.
Jamais plus se disait-il, je ne pourrais aimer quelqu'un comme je l'ai aimé elle, un amour entier et dévorant où chaque seconde l'enivrait d'un parfum intense et capiteux.
Sa soif inextinguible d'elle l'avait mené sur tous ses chemins de traverse jusqu'à ce qu'elle décide que non, ce ne serai pas lui l'homme de tous ses voyages à venir.
Il baissa la tête et regarda de côté pour vérifier si elle était toujours là. Debout maintenant, elle lissait doucement les pans de sa jupe qui se soulevait légèrement sous une brise naissante, ses gestes étaient lents et gracieux.
Il lui sembla que rien ne pouvait l'atteindre comme si tout ce qui l'entourait n'était un décor interchangeable à tout moment, elle aurait pu tout aussi bien être dans une forêt en Amazonie ou sur une plage au bout du monde que ses gestes auraient été les mêmes.
Ses doigts étaient fins et colorés d'un rose vif, il imagina un instant sa main parcourant ses boucles brunes, s'arrêtant ça et là pour caresser sa nuque.
Pourquoi était-elle là d'ailleurs, dans ce parc, aujourd'hui ?, indifférente aux enfants qui criaient et aux jeunes qui passaient à toute vitesse à vélo.
Sa tranquillité, sa posture immobile et son regard fixe le laissait perplexe et décontenancé.
C'était comme si ils étaient seuls au monde tout d'un cou, elle s'appuyant contre son muret, les pieds bien droits et les bras croisés, ses yeux verts voyageant vers lui telle une embarcation cherchant son ancrage, et lui qui se sentait en pleine perdition face à elle.
Finalement il ramassa sa vieille sacoche et se dirigea d'un pas incertain vers elle.
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