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Pas de deux entre chair et fer par Sablaise1

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La nuit vient de tomber, la lune ronde veille sur la place devant le prieuré où le public attend sagement que débute l’étrange ballet annoncé, un pas de deux entre un homme et…une pelleteuse. Au milieu de la place tous observent avec curiosité l’énorme engin dont on ne peut imaginer un seul instant qu’il puisse se transformer en danseuse. Soudain une magnifique voix de soprano envahit l’espace tandis qu’un homme sort de la porte du prieuré, vêtu d’une chemise blanche, d’un pantalon noir, et ganté de noir. Il semble minuscule devant la belle d’acier qu’il contemple longuement avant de s’incliner devant elle jusqu’à toucher le sol. Elle lui rend le salut en abaissant son godet jusqu’à terre, le ballet peut commencer. Il tourne un temps autour d’elle puis s’enhardit à la toucher, à grimper dessus et voici qu’elle l’élève dans les airs et tourne avec lui avant de le redéposer doucement au sol. La suite n’est pas facile à décrire. Il se tient tour à tour couché, assis ou debout sur la pelle virevoltante. Parfois il s’accroche à elle suspendu comme un acrobate à son trapèze. Lorsqu’il redescend au sol, c’est elle qui vient le chercher, jouer avec lui, le frôler et même le bousculer en douceur avant de l’emporter à nouveau dans les airs. On oublie peu à peu la machine. C’est bien un pas de deux entre deux danseurs, l’un de chair et l’autre de fer. Il y a même par moment comme de la tendresse entre ces deux-là…si, si je vous l’assure. Il y a quelque chose de charnel dans la façon dont ils se perdent et se retrouvent, se frôlent et s’étreignent, dans ce geste incroyable qu’elle a pour venir l’envelopper et l’emporter avec elle, le godet replié comme la main géante de King Kong sur son frêle amour. On a si bien oublié que la pelleteuse était machine, que lorsque le ballet se termine on ne comprend pas pourquoi seul l’homme vient saluer le public enthousiaste. Le machiniste alors sort de son habitacle pour saluer à son tour et les deux hommes désignent ensemble leur partenaire d’acier pour qu’elle reçoive sa part méritée d’ovations. Quelques personnes sont restées échanger avec les deux artistes, le danseur Philippe Priasso et le machiniste Eric Lamy. Ceux-ci expliquent le pourquoi de cet improbable duo qui tourne dans le monde entier depuis 2005. Ils racontent aussi leurs difficultés : la nécessité à chaque représentation de s’adapter à une nouvelle machine variant entre huit et vingt tonnes, la concentration et la précision qu’il faut pour que dans ce corps à corps parfois serré la machine ne blesse pas l’homme. C’est un spectacle de la compagnie Beau Geste nommé « transports exceptionnels ». Sur le site de la compagnie vous trouverez le calendrier des futures représentations. Je mets en lien une vidéo du spectacle complet qui dure une vingtaine de minutes, elle ne donne hélas qu’une petite idée de ce que nous avons pu voir dans la réalité mais comporte un commentaire intéressant du chorégraphe Dominique Boivin. (A voir aussi dix des photos que j’ai prises tout au long du spectacle dans ma galerie photos)

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