Voilà, le vrai gâchis, digne ce nom, il s'impose à moi lorsque j'écoute, comme en ce moment, « There she goes » de The La's, extrait de leur unique album éponyme de 1990. Vous imaginez un peu : ce groupe anglais au talent insolent a commis cet imparable single à la beauté immédiate, patente, mais leur leader, Lee Mavers, ce génie torturé, n'a jamais pu se satisfaire de la production du disque, qui leur fut imposée par une major et qu'il jugeait (abusivement ?) inadéquate. « N'achetez surtout pas cette pourriture technologique ! », déclarait-il au public déconcerté en guise de promo de son album mal-aimé.
Il a logiquement fini par découragé ses acolytes, partis former d'autres groupes moins compliqués, moins empêchés chacun de leur côté. Et cela fait maintenant 25 ans qu'il tente de ré-enregistrer, selon sa vision maniaque et vétilleuse, cette collection de chansons pourtant impeccables - qu'il peaufine pathologiquement dans le sous-sol de ses parents, qu'il n'a jamais quitté.
Storytelling, quand tu nous tiens... Cela doit être l'essence d'un certain romantisme, chez moi, cette fascination morbide pour les destins brisés : les musiciens dépressifs et suicidaires Elliott Smith, Nick Drake et Donny Hathaway ; les leaders profondément névrosé des La's, donc, mais aussi du Pink Floyd première époque (Syd Barrett) ; le sinistrement fameux "Club des 27" (Kurt Cobain, Jimi Hendrix, Janis Joplin, Amy Winhouse...), j'en passe et des meilleurs.
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