De vous,
je ne savais rien sinon que ce nom de Loulou; mais parut votre image sur mon écran mental, comme une danse idéale et vive, transe de paix et de lumière vécue sans parole autre que celle que disent les singuliers silences entre deux vies qui aspirent à connaître autre chose que le mal de l'ennui et de la norme... en entourant de syllabes innoçentes un Oui d'éternité.
Vous portiez devant lui une lueur informe, avec une veilleuse entre le mal et vous. Jack a tombé bas le masque, le ramasse à genoux, et avec lui la cohorte des hommes, en lui tant résumé le criminel-amant.
Pabst, 1920, Berlin, le Noir et Blanc: mariage de la pélicule et des moteurs des visionneuses, vous êtes en train de lire une volée de notes, un livre de désir ouvert sur de la vie. Et la danse pour magnifier tout ça...
Rochester, bien plus tard, des tartines de confiture vous donnent de la joie, des chats qui vont et viennent, moins mauvais que les hommes et que leur pauvres haines, ces prétendants absconds de la gloire des pîtres.
Vous, deumeurée belle, restez par devers vous et brave devant vos mots à la table d'écriture.
Pabst, puis nombre d'autres vous consacraient, et vous, libre, refusiez des contrats, refuserez Hollywood, le son et ses orgies de dialogues stupides, vous étiez la vie et ils croyaient encore au pouvoir de leur art tout juste en train de vivre sa pauvre mort à lui... entre de pieux mensonges que profère ici l'argent-roi.
Et pourtant des amis, deux saltimbanques, arpenteurs du réel entre deux prises de vie, Charles le Grand Chaplin et Buster le clown blanc au cannotier, deux élégances désuètes, enfin, car humaines et pleines elles aussi de nobles vies à voir et à aimer.
Aucun homme n'a su votre rêve porter, de tous ces enfants tristes que sont presque tous les hommes, en votre danse, Louise, qui arpentiez la vie comme une femme ardente et pleine de savoir, mais du savoir des humbles qui fuient toutes les histoires pour connaître l'Histoire de leur coeur singulier, vous avez su créer une vie plus haute et mieux humaine, qui toujours demeure en crue du seul présent.
A Rochester, il est tard, des grandes lettres belles entament tard dans la nuit une oeuvre de mémoire, une oeuvre de Femme libre et de grande voyageuse, aucune artiste au monde n'a pu vous offenser: pour cela, il faudrait bien mieux que le génie, cette étiquette à norme qui veut normer la grâce et quantifier l'infini.
A vous la liberté sans l'idole des masses, à vous la charité d'une danse très humble que seul un clown bleu vous aurait pu répondre. Et le verbe de vie qui se passe des mots!
Sans parole mais pleine de pensée, vie ardente et féconde, vous êtes et demeurez juste de votre silence et vive de vos scènes, toute offerte et portée par une vie pleine de science parce que si bellement vécue, vous la femme et l'actrice, vous au delà des clichés, ne posez un regard devers les temps vulgaires, vous étiez la Lulu des faubourgs de la ville, vous êtes lauréate d'une vie restée belle, juste et sereine jusqu'au dernier soupir devers elle livrée!
A vous, Louise, merci, d'avoir su rester Femme,
d'avoir été là, libre et présente en l'instant, éternelle
en ce mouvement libre et fécond des vraies vies
qui n'ont d'autres destin que de ne pas en avoir, ni être d'aucun lieu si ce n'est l'Absolu.
Jamais les êtres libres ne deviennent des idoles, à moins que dans le nombre un mystère soit profané. Le muet est ainsi, votre voix, c'est la grâce, votre geste, la vie et votre coeur résonne encore au fond des mots que votre oeuvre a légué à cette enfant informe mais pleine de penser qu'est notre race humaine et grave, au moins parfois, de présence éternelle.
Merci.
En souvenir de Madame Louise Brooks ( 1906 - 1985 ), danseuse du verbe et de la Vie
Femme libre & citoyenne du monde,
écrivaine et mémorialiste, amie des chats et de la contemplation, du silence et de la grande voie, amie de Buster Keaton, Charlie Chaplin et de GW Pabst entre autres géants ...
et, peut-être, la plus grande actrice du septième Art ?
Une voix à force de silence .
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