Une fourmilière c'est un pays à elle seule, chacun et chacune à son rôle et cela m'a donné l'idée du petit texte qui suit:
«Le soleil n'est pas encore levé, bientôt sa couleur rose illuminera le ciel, pour petit à petit amener sa lumière sur la fourmilière, mais déjà les travailleuses s'agitent en préparant le premier repas de la journée, ensuite elles réveillent une à une les fourmis blessées encore endormies. C'est avec le sourire et l'écoute des petites affaiblies qu'elle prodiguent leurs soins, chaque sourire et un rayon de soleil pour les petites malades, un coup de chaleur, qui leur fait apprécier la douceur de se lever de soleil, la journée va commencer. Un petit repas doux pour remettre un peu de force dans les fragilisées, on se lève, on se lave avec toujours une attentionnée derrière la porte, mais laissant les petites blessées dans leur intimité minimume qu'elles veulent sauvegarder.
Les fourmis infirmières font leur tour prennent la tension des petites malades vérifie leur place sur leur petits chariots, pour pouvoir rouler dans la fourmilière; rencontrer les moins abimées et ceux beaucoup plus, croiser les bébés fourmis qui se comportent avec le sourire de leur innocence qui n'est que façade, derrière le sourire il y a les larmes, cachées, retenues placées dans le fond de leur âme, tous le monde se séparent pour aller dans les différents coins de la fourmilière!
Il y a la grande mare d'eau salée pour faire remarcher les papattes dans l'eau tout est si facile, son corps on ne le sent plus il vole, il n'a plus mal, l'âme vole au dessus du corps endolori. Dans une autre salle il y a tout un tas d'appareils bizarres un peu effrayant mais qui vont tendre les membres, les ranimer, les aider à reconnecter les fils cassés qui ont perdus le chemin du générateur de toutes les commandes!
Après tous ces efforts les petites abimées, filent se rassasier, pas trop non plus car les fourmis cuisinières ne sont pas des cordons bleus, mais on est pas là pour se laisser vivre, on doit revenir dans la grande fourmilière de la grande ville, toutes revigorées pour enfin aller vers de nouvelles aventures de petites fourmis plus ou moins recollées, plus ou moins sur leurs pattes ou avec leurs roulettes mais plus vaillantes qu'avant!
Pas facile d'être une petite fourmis blessée dans la fourmilière où chacun ne roule que pour lui même, où l'écoute des autres n'existe pas, où il faut retrouver sa place dans cette société où une fourmis abimée est éjectée de la grande fourmilière, elles doivent drôlement ramer les petites fourmis à mobilité réduite pour montrer qu'elles existent et qu'elles ont le droit à leur place au soleil, ce soleil qui se couche ce soir en plongeant dans l'océan qui nous berce doucement vers un sommeil réparateur.»
Agnès
"Je suis toujours debout sur la mine. Nous étions partis ce matin en patrouille et je marchais derrière comme d'habitude, ils sont tous passés à côté, mais j'ai senti le déclic sous mon pied et je me suis arrêté net. Elles n'éclatent que quand on retire le pied. J'ai lancé aux autres ce que j'avais dans les poches et je leur ai dit de s'en aller. Je suis tout seul. Je devrais attendre qu'ils reviennent, mais je leur ai dit de ne pas revenir, et je pourrais essayer de me jeter à plat ventre, mais j'aurais horreur de vivre sans jambes. Je n'ai gardé que mon carnet et le crayon. Je vais les lancer avant de changer de jambe et il faut absolument que je le fasse parce que j'en ai assez de la guerre et parce qu'il me vient des fourmis.
Boris Vian "les fourmis"
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