GOUTTES D'HOMME par Fosterwelles

Mon train, le 12h57 en provenance de Paris, va entrer en gare ! … dans cinq minutes Dans cinq minutes, il sera là, m’offrant son profil métallique, long, aussi dur qu’une balle de fusil A son arrivée, je grimperai entre les feuilles vitre-acier de son corps luisant comme une lame. Je trouverai une place, ma place, choisie la veille, et je m’essaierai… calmement Dans quarante minutes, il sera 13h37. A 13h45 au 82 de la place des Cœurs Vaillants, madame Lantrieux m’attendra pour ma séance de sauna réservée il y a, disons,… douze à 13 minutes. J’avais hâte… J’adore être nu dans les espaces étrangers. La chaleur sèche fatiguera mon souffle, épuisera mes muscles, confinera le stress accumulé d’une semaine aussi folle que vaine, … Il me faudra me concentrer, respirer lentement, penser à elle, … ma surface de chair se substituera à mon esprit angoissé... …Hum umm, ce sera bien. La sueur deviendra ma maîtresse, à grosses gouttes, j’aimerai ces caresses, son odeur, l’excitation que ce mélange inventera. A 70° celsius, mon sexe sera droit et j’essaierai d’en jouir seul, en mort léché par sa tombe. Et je me toucherai… Suivant la projection qui sera mêlée à mes huiles, une sorte d’épuisement bienheureux glissera sur mon regard mi-clos, presque inhumain. 70° celsius de chaleur sèche. Sous mon nombril, mon sexe se ramollira timidement, son poids aérien se posera entre mes cuisses entrouvertes, … et là, au creux d’un berceau bouillonnant, il se rendormira sagement pour quelques heures. Encore trois minutes de sudation, les toxines se seront échappées et le calme dans mon âme se sera aventuré. Le noir ! La séance sera terminée. L’eau fraîche me lavera, moi, la figue sèche, je retrouverai mon jus, baigné par la splendeur de la pluie industrielle. Mes chaires en se moment se seront raffermies, ma respiration sera à nouveau normale… Je me rhabillerai, quitterai l’institut en un mouvement de porte et à nouveau revisiterai les espaces de mon monde. Mon train de 12h57 en provenance de Paris, devait entrer en gare il y a cinq minutes. La dame du haut-parleur l’avait dit, il y a 10 minutes… ...Mais le révolver s’est enraillé, la balle a été contrarié, contrainte de se figer net, plantée dans le corps éparpillé du suicidé de la ligne Paris-Metz… …Les gouttes d’hommes, partout, ont entaché le visage de mon train. Je n’aurai pas mon sauna, un autre a déjà bien trop transpiré ! A 14h25, le Paris-Strasbourg va entrer en gare. C’est la dame du haut-parleur qui l’a dit. Sur le quai attendent 3 bancs