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les je de l'amour et de la vie ne sont pas des hasards par Touslesbato

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« Ah, lui dit-elle un jour, quand cesseras-tu de me donner des échantillons de toi, et me donneras-tu toi tout entier ? - Ah, dit Jim, quand donc permettras-tu à notre amour de poursuivre sa coulée douce, au lieu de le trancher soudain comme le boulanger sa pâte ? » Court dialogue extrait de « Jules et Jim ». Incisif, vrai, et tellement bien écrit. Récit d’un amour fusionnel. Entre Kathe et Jim. Entre une Kathe jusqu’au-boutiste et un Jim qui voudrait se la couler justement douce mais.... Premier livre écrit par un vieux monsieur de 74 ans, Henri Pierre Roché. Récit-Roman à clefs biographiques, c’est certain. Ressemblait-il plus à Jules ou bien à Jim, à moins que ce ne soit les deux, ces deux êtres un peu passifs et attirés par des femmes fortes et sidérantes ? Et Kathe, est-elle vraiment à l’image de sa réelle compagne, à moins qu’elle ne représente l’image fantasmée de la femme toute puissante manipulant à sa guise un pantin, voire des pantins consentants* ? Ce livre a été rendu célèbre par le film de Truffaut et l’actrice avec la voix la plus rauque du cinéma français. Henri Pierre Roché n’a pu voir le film, il est mort avant. Le film je l’ai découvert tardivement à la télé. Il est bon, voire très bon. (je vais en mettre un extrait dans la galerie vidéo, il sera le 13e à figurer dans ma liste de films romantiques à voir ou à revoir) Le livre je l’ai lu il y a peu de temps. Il est excellent. Mais ce livre m’a aussi énervée, non ce n’est pas le livre, c’est le personnage de Kathe qui, à plusieurs reprises, a failli me faire lâcher le livre, comme Jim a plusieurs reprise semble lâcher prise et se détourne lâchement de son amour. Lâche, Jim oui évidemment, tellement homme dans sa volonté de ne faire mal à personne, de préserver, aussi incroyable que cela puisse paraître Kathe mais aussi Jules, Gilberte..., lâche parfois dans sa manière fuyante de ne pas répondre aux coups de Kathe ou au contraire d’être brutalement mais rarement (une fois !) excédé par une Kathe qui donne, prend ou reprend trois fois plus qu’elle n’a donné, qui veut plus, qui ne s’arrête pas ou presque jamais. Kathe lumineuse et fascinante, Kathe noire et combattante, qui se bat pour son amour et n’hésite pas au besoin à se battre contre, plutôt le tuer de sa belle mort que de le laisser vivre à petit feu. Deux êtres qui s’aiment mais deux manières de concevoir l’amour. L’un tout en force et en exclusivité, l’autre tout en passivité et retenue, les contraires s’attirent irrésistiblement ... comme des aimants. Mais est-elle folle enfin pour oui, régulièrement, blesser, écourter, tromper, cet amour dont elle dépend tant. Qu’est-ce qui lui prend et Jim pourquoi ne se révolte-t-il pas plus ? « Le retour, la station, le petit train, la ville. A pied ils contournèrent un parc. Ils s’arrêtèrent devant la maison de Harold, se dirent au revoir. Kathe donna une poignée demain à Harold. Elle rejoignit Jules et Jim. Ils allaient rentrer tous les trois. Qu’avait signifié tout cela ? Kathe se ravisa : - Donne moi ce petit paquet, dit-elle à Jules. Il le lui tendit, la ficelle était serrée à bout de son petit doigt. Elle le déroula, saisit le paquet, retourna à Harold, lui prit doucement le bras, souhaita poliment : « Bonne nuit ! », et marcha avec lui vers le grand porche où ils disparurent. L’épaisse porte claqua derrière eux –devant Jules et Jim, plantés là, ébahis. - Re-bien joué, dit Jim, deuxième coup de théâtre et emploi du pyjama blanc. Je ne m’y attendais pas. Kathe les frappait tous les deux à la fois. Jim prit le bras de Jules et ils marchèrent ensemble. - Ouf ! fit Jim. - Ouf, répéta doucement Jules. - C’était sans doute utile, dit Jim... Je m’étonne qu’elle n’ait pas choisi un homme nouveau pour lui confier ce rôle, Harold lui a déjà tant servi... - Pourquoi ? dit Jules. Harold était parfait pour ce soir. Ils entrèrent dans une brasserie, burent de la bière fraîche, allumèrent de longs Virginias, et reprirent, jusque tard dans la nuit, et sans y mêler Kathe, leur conversation de célibataires. » Heureusement qu’il y a Jules et son amitié. Qui a survécu à l’amour du premier avec Kathe et de Jim avec cette même Kathe. Impossible de résister à cette femme. Tous, y compris Jules sont fascinés. Jules s’est engagé très vite puis s’est retiré du jeu, trop peu de résistance envers Kathe, il accepte tout : l’éducation des filles, le ménage à 3... Pas drôle. Jim lui est plus ambivalent. Son indifférence excite Kathe. La plupart du temps, ses provocations ne changent pas le cours de leur vie, elle l’égratigne juste un peu... beaucoup. Cap, pas cap... Il refuse de rentrer dans son jeu ... sauf une fois mais ce n’est pas son genre. Jim voudrait être tranquille, Jim voudrait jouir de la vie mais c’est impossible. La seule manière qu’il a de ne pas sombrer dans la folie de Kathe, c’est de prendre de la distance... silencieuse et physique. Cela rend encore plus folle Kathe... et souvent « noyeuse ». Ah ! Cette fascination tout au long du livre pour l’eau et les plongeons dans les rivières. Kathe veut se noyer dans son amour, pas Jim mais la vague de Kathe est irrésistible surtout quand on est fatigué. « Ils ramèrent jusqu’à la rive italienne. Au retour un orage déborda la crête des montagnes et fut vite sur eux. La pluie les aveuglait, des vagues courtes les secouaient et embarquaient. La foudre claquait sec. Ils ramaient à quatre rames et se hâtaient vers le rivage qui était encore à un quart d’heure. Leurs rames se heurtèrent une fois. - Assieds-toi à l’arrière, Jim, dit Kathe, écope l’eau et laisse-moi faire. Jim ramait bien, mais Kathe encore mieux. Il obéit. Il voyait maintenant une Kathe dans sa chemisette de soie blanche, ruisselante, collée à sa peau, toute à son affaire, souquant comme un marin. Ses yeux pétillaient. Elle souhaitait que le bateau chavirât, pour corser l’affaire et pour pouvoir sauver Jim – ou pour se noyer ensemble. Elle les mena à bon port. » Kathe a tant d’énergie et quand tout va bien, tant de bonheur à donner, la vie dans ces cas là est douce et sereine, Kathe rend souvent les gens heureux mais l’orage est toujours prêt à éclater, sans raison... vraiment ? Le bonheur est tellement angoissant. Cependant la vie n’est pas un roman. Et la réalité rattrape une passion. Qui ne peut qu’exister qu’entre deux murs et entre-deux. Le dehors et les autres se chargent de la ramener au réel. « Kathe donnait bravement et simplement quelques réceptions dans son petit « chez elle » (ce n’était déjà plus « chez nous ») à des artistes de son pays et de France. Jim s’y sentait superflu et il y assistait de moins en moins. Il ne pouvait admirer Kathe sans réserve que seule. En société, elle devenait pour lui relative. » Kathe sent tout. La tiédeur lui est insupportable. Alors, telle une araigne, elle tisse sa toile. Et pique quand on ne s’y attend plus... d’une manière inoubliable tant pour sa victime que pour le spectateur privilégié de son effondrement. Je ne l’ai pas noté mais il me semble qu’à la fin, Jules pousse un soupir de soulagement. Ouf... la vie sera si simple dorénavant. On n’a jamais retrouvé le journal de Kathe quoiqu’ait raconté Roché. C’est dommage. Peut-être que les ombres de Kathe, ses ressentis douloureux et extra-ordinaires auraient été mieux expliqués. Peut-être qu’on aurait mieux pu comprendre ? Mais faut-il toujours tout comprendre ? ** * Ce com est une rediffusion. Il a été écrit il y a plusieurs mois. Et c’est il y a quelques heures que j’ai eu les réponses. Henri Pierre Roché est Jim tandis que Jules, le mari compréhensif et l’ami éternel, est Franz Hessel, un écrivain allemand. Quand à Kathe, son vrai nom est Helen Hessel et c’est la femme de Franz. Pourquoi je vous parle d’eux ? Et bien parce que tout simplement, ce sont les parents de Stéphane Hessel, ce vieux Monsieur sympathique et très engagé, toujours vivant et toujours jeune d’esprit. L’homme phare décrit par le tout récent com de Roule... intitulé sobrement « L’homme ». Stéphane Hessel semble avoir voulu épater sa mère et y avoir réussi en devenant lui-même une sorte de modèle positif, malgré ou grâce à la personnalité de sa mère. Tout cela ne m’étonne guère... ** La vie est pleine de liens, qui peuvent être décryptés ou non.

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