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J'ai promis... par Passemoilo

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Vingt cinq autres canards (des bleus à chapeaux roses cette fois ci !) viennent s'empiler sur les six douzaines qui s'entassent déjà dans cette putain de cabine téléphonique. Plus de 9 heures que je m'y débat comme un poisson rouge dans un cornet de popcorn ! Cette nouvelle insurrection des emplumés d'Hitchcock m'écrase définitivement la tronche sur la porte de verre. Je bave mon dernier souffle contre la vitre. Et par instinct, du bout de la langue je tente un dernier SOS dans la buée... Le SOS de la dernière chance probablement... Non... je dois m'accrocher, je ne dois pas flancher... quelqu'un va venir... Je ne peux pas mourir comme ça ! Etouffé par une colonie de cartoons palmés. Ce serait vraiment trop con. L'éclairage du parking vient de s'éteindre, le jour se lève, les employés du supermarché vont certainement débouler d'un moment à l'autre. Dans mon dos le téléphone s'est remis à sonner. J'ai fini par renoncer à l'atteindre. Maudit téléphone ! Pourquoi tu t'es laissé prendre en otage par ces cons de palmipèdes. Le gros canard à pois jaunes qui perche sur le toit s'est remis à chanter «La maman des poissons»... Naaaan ! pitié pas ça... J'le supporte plus ce Boby Lapointe. Mon Dieu si tu existes vraiment fait moi une faveur... Rends moi sourd ou je vais devenir brindezingue ! Le Tout Puissant m'exauce, sous les trilles du volatile la cabine vient d'exploser... Je bascule dans le néant. Il me faut bien cinq minutes pour atterrir. Je ne sais pas combien de temps ce foutu cauchemar a duré mais la nuit est tombée, le peu de lumière que le trou de serrure diffuse s'est évanoui. La flamme de mon briquet balaye mon cachot. Barré comme c'est barré je devrais plutôt dire «Ma tombe » Quatre parois de bois et tout là-haut une tringle et... une cravate. Une cravate fantaisie avec des canards multicolores... Pas la peine de chercher d'où me sort ce cauchemar à la con. Je m'assoie sur la marche du haut et entame mon tout dernier repas; Quatre Smarties... Après ça je devrais m'attaquer au cuir de mes godasses. Trois jours que je suis coincé là dedans. Trois jours à me torturer les méninges pour en sortir. La penderie de mon regretté grand-père. Une espèce d'armoire normande taillée pour vivre jusqu'au jour du jugement dernier. Une casemate en cœur de chêne capable de vous protéger des dix prochaines invasions. Amenez vos conserves et vos barres vitaminées, et ensemble on écoutera défiler l'armée chinoise au fond des plaines. Bien à l'abri. Saloperie de placard. J'étais venu le récupérer pour y faire pousser du shit à Melun. En toute discrétion dans mon F3. Trois ampoules solaires et deux ventilos pour me blanchir le cerveau à moindre cout c'était pourtant le bon plan. Au moins jusqu'au moment de le descendre par cet escalier de m.... Moi et mes idées lumineuses. Pour faire le malin j'ai viré le plancher et je me suis collé dedans pour le déplacer façon "bernard-l'hermite". Une combine du tonnerre sur terrain plat. Mais dans les pentes faut éviter. J'ai à peine senti la première marche sous mes pieds que mon blockhaus s'est transformé en bête humaine. Je n'ai réouvert les yeux que lorsque le fracas a cessé. Ma loco littéralement encastrée dans le virage de l'escalier avait ses deux portes bloquées par la main courante. J'ai eu beau gratter, cogner, pilonner le meuble. Rien à faire. Son géniteur l'a chevillé dans tous les sens. Comme si le diable ne devais plus en sortir. Peut être même qu'il pensait à sa belle-doche le bougre! En bas dans la cuisine un «Ta Katie t'a quitté» nazillard récidive pour la millième fois. Malédiction. J'aurais jamais du appuyer sur la touche du crin-crin auto-reverse du grand-père. Dès le premier soir j'ai prié pour que ses piles me lâchent la grappe. Mais depuis la mort de l'ancêtre l'appareil était resté branché sur le secteur... Depuis je transpire sur «Aragon et castille», je gerbe sur «Saucisson de cheval» et j'agonise sur «Le papa du papa» Je dois certainement expier pour un truc abominable. Dans une autre vie, j'étais surement un beau salopard ! En tous cas si je m'en sort j'irais à Pezénas. Sur la tombe de Boby. Avec un tonneau de goudron et des plumes. J'irais aussi déglinguer le fion de la connasse qui n'arrête pas de laisser des messages sur mon portable. Au fond de la poche de ma veste, dans le hall. «J'attends toujours des explications pour le lapin que tu m'as posé l'autre soir! Tu pourrais au moins avoir le courage de me dire en face que c'est fini entre nous !» Cette triple buse est la seule qui aurait pu rappliquer par ici. Je suis certain de lui avoir dit où je devais me rendre avant notre partie de jambe en l'air. C'était au boulot. Dans l'ascenseur. Pendant qu'elle me... Une bouche pleine ça n'a jamais empêché les oreilles de fonctionner bon sang ! De rage je fais valdinguer cette saleté de cravate qui me chatouille le crane dans l'obscurité. La sournoise! Elle a déjà deviné que je me la passerais autour du cou avant le levé du jour. La face B de la cassette repasse dans vingt minutes... et à la fin de la bande il y a «Framboise» qui nous attend. Elle et moi... J'ai décidé de me pendre sur ce titre... Je ne sais pas pourquoi. Dans mon autre vie j'ai du connaître une Françoise qui m'en a fait baver (héhéhé) ! Je rigole tout seul dans ma tête... Une dernière petite bandaison pour la route... avec Françoise! Hmm.. je suis lamentable. Et ma fin sera pitoyable. Le notaire me retrouvera au printemps lorsqu'il viendra faire visiter les lieux aux premiers clients. Je serais là, tout desséché au fond du placard comme une vieille morue racornie par le soleil. Pas très glorieux. Limite ridicule. Quand je pense à toutes ces morts héroïques. J'aurais préféré crever sur un radeau au milieu de l'océan ou congelé scotché à la parois d'une montagne. C'est pathétique. «Connard... Faut dégonder !» J'entends des voix ? On a parlé derrière la porte. Sous la lueur de mon briquet je n'aperçois que les pieds de la rampe qui bloque les portes et me piège ici. Au bout d'une marche il y a aussi cette saloperie de cravate qui se débine par dessous le meuble. Salope! Les rats quittent le navire! Entortillée comme elle est, dans ses replis je crois reconnaître un visage familier... un sourire goguenard. Celui de mon grand-père. «C'est toi grand-père?» Je deviens con. Voilà que je parle à une cravate! Qu'est-ce que t'entends par «faut dégonder?» papy? Tu me prends pour un naze... bien sur que j'ai essayé de les dégonder... Y'a rien à faire. J'ai aucune prise pour lever ces foutues portes ! A ce moment précis en guise de réponse, une lueur divine illumine l'embrasure de la porte...Le chemin du salut ! Après avoir défoncé l'auto-reverse à coup de tabouret, je me suis assis quelques instants au pied de l'escalier. Pour griller la première cigarette de ma nouvelle vie. Au bout du champs voisin une moissonneuse fait ses longueurs. Ses phares balayent régulièrement le jardin, la fenêtre et l'escalier où trône l'armoire du grand-père. Par l'embrasure j'ai pu glisser la cravate sous la porte. J'ai récupéré les deux extrémités et j'ai tiré un coup sec. Et me voilà... Demain je me marie avec la connasse du téléphone. Je porterais la cravate avec les canards et j'entrerais dans l'église sur l'air de «Bobo Léon». J'ai promis...

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