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DU POIVRE DANS LE SLIPPING par CALINOSCOPE

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Si un homme avait dirigé ce film, la plupart des femmes aimeraient le castrer d’un coup de dent. Les femmes y paraissent sottes, vaines et sans consistances, à coté d’hommes falots, mais ce n’est pas une excuse. Sofia Coppola n'épargne ni la bêtise de celles qui vendent leur corps, ni ceux qui les consomment, ni la faiblesse de leurs prétentions. Pire, si Sofia Coppola expose le corps de son comédien comme chose désirable, c’est pour mieux nous entraîner vers la mise à distance. Alors d’où vient le sentiment d’assister à quelque chose à la fois d’intime et d’important ? « Somewhere », facile à oublier ou mépriser d’un mouvement d’épaule, demande un effort. Pas d’être passif. Si vous acceptez d’être déboussolé un instant, car chaque scène cache ses intentions, vous recevrez beaucoup en retour. C’est une belle réflexion sur les impasses, le sexe en self-service, le corps, sa représentation, son désir, et son vide absolu. Sur un monde dont les acteurs n'ont plus de textes, c'est à dire sur nous même. Le rythme du film est assez lent, ce n'est pas un Couiky entre deux portes avec gélule chauffante (mais qui aimes ça?). Il demande un peu de complicité. Comme toute les belles rencontres, le lendemain il vous donnera un coup de téléphone. Il reviendra vers vous. « Somewhere » commence et finit autour d'un bras cassé, comme le poème d’Henri Michaux du même nom. ce bras cassé est prétexte à un rapprochement entre un père célèbre (Steffen Dorff génial en Tintin mal réveillé) et sa fille. Ils acceptent tout l'un de l'autre, de peur de se perdre. Coppola filme l'attachement sincère, admiratif, de ce père envers la petite, d'une fille envers son père, sans grandes phrases, ni scènes déchirantes. L’inverse d’un Tarentino, avec lequel elle n'a pas été sans rapports... (sourire)... Il n’est jamais suggéré d’approche psychologique. L’intériorité est soigneusement écartée au profit d’une description du comportement, des actes de personnages dont le corps est commercialisable. Des personnages buvards, flottant sur la piscine de leur vie, remplis d'alcool, obéissants à tout, riches et connus, parfaitement intégrés et parfaitement minables. Une vision loin des gros sabots Hollywoodiens, du modèle américain, de l’exemplarité d’une success-story, à l’image de l’Alfa Roméo vrombissante du héros qui ne fait que du bruit… Dans cette vie ou la vie devient une imitation de vie, une singerie, un simulacre, avec l’odeur fade d’un lac oublié, la séquence où le père regarde sa fille faire du patin est exemplaire. Nostalgie d’un moment, la pré adolescence, où la sexualité non éclose n’est pas encore un fardeau. Très perceptible également dans la séquence devant la télé, où tout deux miment, grâce à des bidouilles électroniques, les solos de musiciens sur un écran. La scène du moulage de la main, puis du visage du comédien, rappelle que le personnage n’est qu’une empreinte, une trace, une absence, qui n’évoque même plus l’animal qui l’a formé. Coppola montre avec humour que cela donne un Dorian Gray fatigué et hagard. Le corps ne peut mimer que la vieillesse. Un plan résume tout le film. Le héros croise dans l'étroit couloir menant à sa chambre trois superbes jeunes femmes, mannequins ondulants, gansées de robes moulantes noires disparaissant par une porte entrouverte. A-ton mieux montré en trois secondes la transparence et les fantômes du désir? Le sentiment que tout file entre ses doigts? Sofia Coppola (Marie Antoinette, Lost in translation) travaille sur la dissolution, pas sur le futile. La manière dont elle en parle oblige à mieux discerner ce qui cloche dans les illusions de notre vie. Sans coup de marteau. Avec une patte légère. Elle filme des sucres qui fondent dans l'eau. Pour mieux nous rappeler ce qu’est l’alcool. Un monde préoccupé seulement de marketing n’a plus rien à nous dire et Sofia nous ne dit joliment. « Somewhere » se place dans une lignée de grands films sur le regard du spectateur comme ceux de Minnelli : « Les Envoûtés » et « 15 jours ailleurs », Fellini : « Dolce vita « » et « 8 et demi ». Michael Powell: "le voyeur". Sofia, en grec, ça veut bien dire sagesse ? Non ? Bonne journée. Ps) Tradition oblige : les femmes intéressées par le manifeste féministe ci-dessus sont priées de se rassembler à 14h32 précise sous l’arche de la Défense, Paris. Caméra 16 mm. Bell Howell 1946 sous le bras droit, casque d’aviateur en cuir, pantalon bouffant et transparent. Pour ma part je serais vêtu d’une tâche de framboise, d’une autre à ma réputation, et d'un pied photo. Prévoir bobines. Venir sobres.

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