Le silence régnait dans cette maison vide
Où nous avions vécu à labri des tilleuls
Un jardin, une treille et quelques très vieux arbres
Avaient veillé sur nous et sur notre bonheur
Je revois les matins où tu sortais joyeuse
Et revenais à moi les bras chargés de roses
Les yeux pleins de rosée et les joues rosissantes
Tu déposais tes fleurs et membrassais fougueuse
Parfois les soirs dété nous marchions tendrement
Le cur dans les étoiles et la main dans la main
Aux abords de létang où régnait ce doux cygne
Qui venait nous saluer de sa parure blanche
Et le temps déroulait son manteau de velours
En ces lieux merveilleux où nous vivions dAmour
Buvant à la fontaine bouche à bouche mêlées
La source qui coulait en un doux récital
Je marche dans nos pas et mon souffle respire
Aux échos de ce temps qui marqua mon destin
La charmille a couvert ce quil reste de toit
Et les chambres résonnent de labsence de Toi.
Si je reviens ici, quelques vingt ans plus tard,
Me morfondre en ces lieux qui me parlent de Nous
Cest quun anniversaire me ramène à nous deux
Une date gravée au plus profond du cur
Au plus fort de lhiver, un soir de grand effroi,
La cheminée flambait sous les lambris dorés,
Je tattendais serein lisant sous la veilleuse
Quand la mort vint soudain me heurter de plein froid
Un appel, une course et bientôt lhôpital
Où lon me conduisit en peur te retrouver
Dans ce coma hideux où tu tétais perdue
Depuis cet accident qui tavait percutée
Je scrutais ton soupir et parlais à ton âme.
Et tu me répondais, je le sais, je lai vu,
Malgré tes yeux fermés et ton pauvre visage
Mais je nai rien pu faire et tu nas rien pu dire
Et lhiver sempara de ma vie, de ta mort,
Dressant de blanches croix et de noirs caveaux
Sous mes pas de zombie qui navaient plus de sens
Jai quitté mon Amour la maison de nos vies
Elle et moi depuis lors avons suivi la voie
Qui mène on ne sait où mais qui ne fait pas deuil
Restant figés à cur malgré les occupants
Qui bien sur un beau jour ont pris la succession
Je retrouve en ce jour lhomme que jétais
Dans cette maison qui vibre et na pas trop changé
Je suis seul, elle aussi, je sens quelle maccueille
Et voudrait que je reste pour moccuper delle
Un doux parfum de roses, celui que tu portais,
Frôle soudain mon âme et me chuchote « viens »
Je le suis au jardin et vois sur le pavé
Quelques fleurs déposées qui dessinent un cur
Aussitôt je comprends que tu nes pas partie
Que depuis ces années tu as veillé sur Nous
Attendant mon retour pour renaître à ton tour
Ayant besoin de moi pour continuer à vivre
Et lHiver se dissout sous des monceaux de cur
Et jentends la fontaine bruisser de tous nos rires
Et je vois cet étang où me sourit un cygne
Et je sais maintenant que nous serons ensemble
↧