Il faisait chaud, il faisait très chaud en ce mois de mai 1958, dans ce petit coin perdu des environs de Parme... où nous faisions mes deux petits et moi un séjour de santé...
A deux ans et demi et quatre ans, mes deux galopins avaient besoin d'une bonne protection contre ce soleil qui nous assommait sous ses rayons..., et pas la moindre boutique de chapelier dans un rayon de trente kilomètres...
La seule solution était d'aller au village, chez le marchand de fruits et légumes qui en allant s'approvisionner au marché à Parme, pourrait me ramener des chapeaux de paille comme en portaient tous les habitants des alentours... et qu'il me porterait quand il passerait pour vendre ses fruits et légumes...
A cette époque, les commerçants passaient dans les hameaux pour nous approvisionner, en pain, épicerie, boucherie et autres, et nous pouvions leur demander de nous ramener de la ville un article qu'ils n'avaient en stock...
Ughetta, une petite voisine s'était proposée de nous accompagner et de me guider au village distant de quatre kilomètres,..
La route poudreuse et blanche, éblouissante sous le soleil nous aveuglait, bien que nous nous soyons mis en route après seize heures, mais nous sommes allés tranquillement, le petitou dans la poussette, le plus grand me tenant la main...
Bien sûr, la conversation en cours de route était pauvre, je ne parlais pas très bien l'italien, et elle ne comprenait rien au français, mais sa mère lui avait bien expliqué que j'allais commander "i capelli" per i bambini... des chapeaux pour les enfants.
Après un arrêt à l'épicerie pour acheter des biscuits pour le goûter et quelques provisions , Ughetta nous a emmener dans une petite rue étroite et ombragée jusqu'à un escalier de trois marches qui s'ouvraient sur une pièce sombre, mi-cuisine, mi-salon de coiffure pour hommes...
Et c'est là que mes deux minos se sont retrouvés perchés sur un fauteuil pivotant, un grand drap blanc autour du cou, et quelques instants plus tard,... la boule à zéro...
Ughetta n'avait peut-être pas saisi le vrai sens de ma démarche, mais le coiffeur lui, après mes explications a bien compris que ce n'était pas chez lui que je voulais aller, mais l'aubaine était trop bonne et ce n'est qu'après avoir passé mes babys aux ciseaux, qu'il m'a dit dans un français presque parfait où se trouvait la maison de Valter, le marchand de légumes...
En rentrant à la maison, je me suis jetée sur mon dictionnaire français/italien, et là j'ai pu lire que chapeau et cheveu, en italien c'était "capello"...
Pas grave, j'avais fait d'une pierre deux coups ! et cela a bien fait rire la famille quand je leur ai raconté l'histoire des chapeaux...
Enfin, deux jours plus tard, mes petits avaient leurs chapeaux de paille, tyroliens avec une plume de faisan, et moi, tranquille pour un bon moment...
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