Quand lautomne arrive, on pense aux feuilles mortes et notamment à la chanson interprétée par Y.Montand et bien sûr à Jacques Prévert, lauteur du texte: « Les feuilles mortes se ramassent à la pelle
» (α). On se souvient aussi du poème de Verlaine « Chanson dautomne » que Léo Ferré mettra en musique et interprétera si bien (β). Et puis, il y a également « Les Feuilles d'automne « qui est un recueil de poèmes de Victor Hugo publié en 1831. Il regroupe en particulier six poèmes appelés « Soleils couchants » (γ).
Chanson dautomne est une uvre de jeunesse de Paul Verlaine. Il offre un exemple poignant de la mélancolie qui perturbait le poète puisquil se croyait sous linfluence néfaste de Saturne. Le thème est celui de la fuite du temps. Le poème prend donc une valeur symbolique mais aussi prophétique puisquil suggère déjà le drame que sera lexistence de Verlaine.
Les sanglots longs
Des violons
De l'automne
Blessent mon coeur
D'une langueur
Monotone.
Dans cette première strophe, le personnage principal est lautomne. Celui-ci nest pas présenté dune façon figurative. Il est cependant personnalisé par des réactions purement humaines et appréhendé par la perception auditive : " sanglots longs ". La métaphore des sanglots sortant dun violon, musique triste, signifie le bruit du vent. Lautomne va provoquer un drame qui va durer pendant deux strophes. Lautomne apparaît comme un personnage actif alors que Verlaine est passif. Il est dans létat de quelquun qui subit cette saison. Et lon retrouve ladjectif " monotone " à la fin de cette strophe. Sa ressemblance au niveau phonique mais aussi sa signification constitue un leitmotiv de lautomne en poésie.
Tout suffocant
Et blême, quand
Sonne l'heure,
Je me souviens
Des jours anciens
Et je pleure
Et je m'en vais
Au vent mauvais
Qui m'emporte
Deçà, delà,
Pareil à la
Feuille morte.
Lautomne provoque, dans la deuxième strophe, le souvenir, les souffrances dune âme nostalgique. Elle apparaît comme une sorte de glas qui engendre la mélancolie et le mal être : " suffocant ", " blême ", " pleure ", parce quelle est le rappel de la fuite du temps : " sonne lheure , " souviens ", " jours anciens ".
La dernière strophe nexprime plus la souffrance mais plutôt une sorte de résignation. Le poète semble sen remettre à la nature, sabandonner à elle. Verlaine, pensant être sous linfluence néfaste de Saturne, était convaincu quun destin fatal lattendait. La ressemblance au niveau phonique de la fin du vers 13 et de la fin du vers 14 : " men vais " et " mauvais " peut-être interprétée comme la marque de ce mauvais pressentiment. Cet abandon conduit à une « transformation funèbre », puisque Verlaine se compare à une " feuille morte ".
Serge Gainsbourg ira jusquà écrire une chanson largement inspirée de ce poème et contenant certains de ses vers. Ce poème illustre particulièrement bien la mélancolie profonde de luvre de Verlaine. Cette mélancolie ne doit pas faire oublier, pour autant, lautre versant de son travail poétique, fait de légèreté et de rire.
Mais lautomne nest pas une saison triste. Glaïeuls, soleils offrent des brassées de couleurs pour les vases égayant nos demeures. Le jardin se peuple de reines-marguerites, de roses dInde et de zinnias tandis que les arbustes comme lalthéa et lhortensia lui donnent un teint de jeune fille.
En montagne, notamment dans les Alpes, lorsque le soleil commence à décliner, les différentes essences darbres produisent des dégradés de couleurs superbes. La magie se produit, un peu plus tard dans lautomne, lorsque les mélèzes se revêtent de leur parure dor.
alioth
Dicton :
« Septembre est le mois de lautomne
Si cigale a chanté
Abondance de blé
Et sil tonne
Vendange est bonne. »
(α) « Les feuilles mortes » chanté par Yves Montand : http://youtu.be/cOsVVeojMZs
(β) Léo Ferré « Chanson dautomne » : www.youtube.com/watch?v=_iq43Vs8CEw
(γ) Extrait d'un de ces textes :
« Ce siècle avait deux ans ! Rome remplaçait Sparte
Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte.
Et du premier consul déjà, par maint endroit,
Le front de l'empereur brisait le masque étroit. »
Précision :
Le manuscrit autographe de Prévert a été acquis en juin 2010 par le Musée des lettres et manuscrits, sur le site duquel il est présenté.
« Les feuilles mortes se ramassent à la pelle... », Prévert écrit les paroles de cette chanson lors de la préparation du film de Marcel Carné, Les Portes de la nuit, en 1946. Jean Gabin devait interpréter le rôle de Diego, finalement confié à Yves Montand, et le rôle de Malou est donné à Nathalie Nattier, après labandon de Marlène Dietrich. Dans le film, des extraits de la chanson sont interprétés par Montand et Nattier (doublée par Irène Joachim). La chanson fut publiée chez Enoch, avant dêtre recueillie dans lalbum Dautres chansons, en 1947.
Les Feuilles mortes
Oh, je voudrais tant que tu te souviennes,
Des jours heureux quand nous étions amis,
Dans ce temps là, la vie était plus belle,
Et le soleil plus brûlant qu'aujourd'hui.
Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,
Tu vois je n'ai pas oublié.
Les feuilles mortes se ramassent à la pelle,
Les souvenirs et les regrets aussi,
Et le vent du nord les emporte,
Dans la nuit froide de l'oubli.
Tu vois, je n'ai pas oublié,
La chanson que tu me chantais...
C'est une chanson, qui nous ressemble,
Toi qui m'aimais, moi qui t'aimais.
Nous vivions, tous les deux ensemble,
Toi qui m'aimais, moi qui t'aimais.
Et la vie sépare ceux qui s'aiment,
Tout doucement, sans faire de bruit.
Et la mer efface sur le sable,
Les pas des amants désunis.
Nous vivions, tous les deux ensemble,
Toi qui m'aimais, moi qui t'aimais.
Et la vie sépare ceux qui s'aiment,
Tout doucement, sans faire de bruit.
Et la mer efface sur le sable
Les pas des amants désunis...
Jacques PREVERT / Kosma
http://rosannadelpiano.perso.sfr.fr/Prevert.htm
Mais l'automne change les paysages et inspire les poètes ou les musiciens un peu partout dans le monde:
Autumn in New York Ella Fitzgerald & Louis Armstrong : http://youtu.be/50zL8TnMBN8
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