Rupture de raison
Après 7 ans dun amour fou, un 12 août, jai choisi de le quitter, malgré lamour toujours présent entre nous. Hélas, au bout du compte, la différence de culture, la famille, son alcoolisme pulsionnel ont eu raison de nous
Souffrance viscérale, tripes torturés, cerveau anesthésié, je suis rentrée en France, le cur lourd de douleurs, mais léger de cette décision sage. J'avais le sentiment de l'abandonner, de le laisser à son triste sort et cela m'était intolérable, mais javais été au bout de moi, au bout de nous, jusquà lautodestruction. Cela devait cesser !
La fin de notre couple sest fait comme notre rencontre, dans lamour le plus total. Je le revois, sur la grande place Moulay Hassan, se retourner une dernière fois, menvoyer un baiser et me faire un signe de la main. Digne dun film. Arrêt sur image, je garde au plus profond de moi, cette image de lui. Désormais, impossible pour lun et lautre de trouver lamour. Son fantôme me hante, mon image lhabite. Jaimerais encore lentendre mappeler du petit nom quil me donnait. Sa peau, son odeur, ses petites rides au coin de lil, son sourire éclatant à ma vue, ses mains sur moi, ses doigts jaunis par la cigarette, ses baisers, mes baisers, sa bouche sur ma bouche, mes baisers, dans un coin précis de son cou, lui donnant des frissons si doux, nos corps fusionnels, ses cheveux noirs si soyeux, les miens si blonds entre ses mains, ses yeux noirs et les miens bleus, plongés au plus profond de lautre, inlassablement. Je suis en manque, en manque de lui, il est en manque, en manque de moi et rien ne nous soulage.
Depuis, lui sest réfugié plus sévèrement dans lalcool. Moi, je me suis jetée dans le travail et chacun traine sa peine et sépuise à faire semblant de vivre. Je le plains de tout mon cur, comme il sait si bien le dire : « Les moindres ruelles dEssaouira me ramènent à toi ».
Dans mon malheur, jai la chance quici, en France, dans ma ville et dans les rues, il ny a aucune trace de lui.
Trois ans plus tard, je ne suis toujours pas remise et aux dernières nouvelles, lui non plus, même si en décembre dernier, il a accepté lépouse que sa mère lui réservait. Qui a dit que les mariages arrangés nexistaient plus !
2 jours avant son mariage, il me téléphonait pour me dire combien il maimait. Je le connais si bien, je sais quil souffre, mais il va gagner une paix royale. Sa famille ne lagressera plus, il va retrouver la place quil naurait jamais dû quitter, au sein des siens. Au bout du compte, ils ont eu raison de nous. Durant ces sept années de vie commune, il a eu le courage de vivre avec moi et d'assumer cet amour, au nez de sa famille.
Aujourdhui, 12 août 2010, je suis triste, cest la date de notre rupture de raison. La douleur est toujours aussi vive, même si je le cache à mes proches, la plupart du temps. Les larmes mhabitent encore. Personne ne mavait jamais aimé comme lui. Il me devinait, lisait en moi, veillait sur moi. Personne ne la jamais aimé comme moi. Je le devinais, le réconfortais, veillais sur lui. Dans notre regard, limmense amour que nous nous portions rayonnait.
Nous avions réussi limpossible, nous avions réussi à dépasser les obstacles, jusquà ce que sa famille se ligue contre moi, leuropéenne et la non-musulmane. Alors que nous deux, nous nous respections et quà aucun moment ces différences nous ont dévorées. Même lalcool, son autre maitresse sarrangeait de nous. Je nai jamais eu à en souffrir directement.
Cest le temps, lusure, la fatigue, le déracinement, le mal du pays, lacharnement familial qui ont eu gain de cause.
Ce qui adoucit ma douleur profonde, cest que malgré tout, lamour est le plus fort. Trois ans après, nous sommes toujours là, lun pour lautre aux moments clef.
Ce qui nous sauve de lenfer de la séparation, cest que nous nous sommes promis de nous retrouver dans une autre vie
حبي, كنت أنت تفوت الكثير, وأنا أحبك
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