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à coeur ouvert par Touslesbato

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Cette nuit, j’ai rêvé de mon père. Il était devant moi, bien en face de moi, il me regardait sans rien dire comme d’habitude. J’ai tout de suite compris que je rêvais alors je l’ai serré très fort dans mes bras, j’ai senti son corps comme s’il était vivant et en bonne santé, je l’ai étreint comme jamais je ne l’ai étreint dans la vraie vie sauf quand il était très malade. Mais, je savais aussi qu’en réalité, il était mort, alors le rêve s’est arrêté très vite. Je rêve peu de lui mais les deux derniers rêves je me suis accrochée à lui. Physiquement. Je le prends dans mes bras et je l’enserre très fort. A chaque fois, je profite à fond de sa présence inventée par mon inconscient. Je me dépêche de prendre de vitesse le principe de réalité qui me rattrape à tous les coups. Pourquoi je ne peux pas vraiment oublier qu’il est mort, même dans mes rêves ? Il me manque mais moins maintenant. Non, il me manque toujours autant et le manque je l’aurai toujours, mais ce manque n’est plus aussi insupportable qu’au début. Les souvenirs s’effacent, c’est faux ce que j’écris, ils reviennent et la vie réelle d’avant et de maintenant s’efface et est remplacée par les souvenirs. Le traumatisme de sa maladie et de son agonie n’est plus aussi agrippant et petit à petit les anciens souvenirs, les bons souvenirs resurgissent et me rappellent à lui, ils reviennent doucement par touches impressionnistes. Mais je ne peux plus échanger avec lui et dans mes rêves, je n’y arrive pas non plus. Ca me fait mal de ne plus pouvoir partager. De ne plus le voir, de ne plus pouvoir l’appeler, de ne plus entendre sa voix. Je regarde les photos de peur d’oublier comment il était, j’ai peur de ne plus me rappeler le son de sa voix. Quelquefois j’ai même des doutes ridicules tant son absence est pesante et si présente : a-t-il vraiment existé ? Forcément puisque je suis là. Parfois je m’en veux, qu’il ne me manque plus autant et en fait c’est faux, il me manque tout le temps, mais à sa manière, tout en discrétion. Il n’a jamais été autant plus présent dans ma tête que depuis sa disparition. Même quand je ne pense plus à lui, je me sens sa fille. Je suis sa fille. Le fil n’est pas rompu. Il se crée quand on donne naissance, et peut-être même avant, on coupe symboliquement le cordon avec la mère mais le lien est là à jamais, avec le père également. Et quand la personne meurt, il est encore là. Mon père est mort, n’existe plus, il n’a plus de sensations, de sentiments, j’ai du mal à croire à l’éternité de son âme même si je voudrai bien, qu’est ce que j’aimerai y croire, mais je le sens à l’intérieur, c’est comme si quand il est parti, j’avais pris un peu de lui, alors que je croyais qu’il avait pris un morceau de moi juste après sa mort, et que je ne m’en remettrai jamais. Le temps a passé et je m’en suis remise. J’ai pris conscience de ce qu’il m’a laissé, légué, transmis. Je ne suis pas lui mais il vit en moi, et moi je vis encore pour lui. Pas seulement, je vis aussi pour moi heureusement, mais maintenant sa mort me donne envie de me battre dans la vie, de profiter de cette vie qui me reste, de continuer ma vie du mieux que je peux, alors qu’au début j’avais parfois envie de le rejoindre, la mort ne me faisait plus peur. Qu’y a-t-il en effet de pire que de perdre mon père ? Si il y a pire mais je n’ai pas envie d’y penser. Ni de l’écrire. J’écris de plus en plus pour me réconforter, pas pour plonger. Quand je n’en peux plus, je n’écris plus. Et je ne parle plus. Les mots parfois ne servent à rien. Mais l’instinct de vie est très fort. Il revient toujours comme les mots. Depuis que je les ai trouvés, à moins que ce ne soient eux, ils ne me quittent plus et il y en a toujours plus. Un peu comme mon père, à jamais perdu mais toujours retrouvé.

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