Jaime le mercredi après-midi, cest le jour où jemmène mon fils au parc pour enfants. Main dans la main, nous marchons, lui en sautillant, moi en sifflotant (faux) un air complètement inconnu.
Ah ! Mon amour de fils, gentil comme un ange, un vrai petit garçon modèle, briefé 15 minutes auparavant pour quil se tienne à carreau, en échange dun paquet de bonbons quil pourra dévorer devant le DVD quil voudra, à lheure quil voudra
Nous nous approchons bientôt du royaume des femmes aux poussettes, des filles au pair,lieu stratégique de ma réinsertion sentimentale et éventuellement amoureuse
A condition que mon rejeton ne se mette à semer la panique en jetant du sable sur les filles et en piquant les petites voitures des garçons. Je lui demande donc de lever la tête vers moi et je lui lance mon fameux regard à la Hannibal Lecter, ainsi quune petite moyenne tape sur la nuque.
Mon entrée triomphale, poussant le portillon tel un cow-boy entrant dans un saloon, est très remarquée par mon futur patrimoine féminin âgé de 18 à 27 ans, pas plus
Je choisis bien évidemment le banc permettant la vision la plus large sur lensemble des filles qui pensent que lamour vient lorsquon ne sy attend pas
Un simple coup dil et tout saccélère : je repère celle qui sera mienne.
Jattire son attention en interpelant mon fils :
« Léo, jai ton goûter, tu me diras quand tu auras faim ! »
Elle me dévisage. Je sens dans son regard comme une tristesse que jattribue à une séparation récente ou à venir
et une lueur dadmiration pour un papa aussi attentif
Je remonte mon col en soufflant un peu de buée pour lui faire comprendre que, même moi, le froid (extérieur
intérieur ?) peut matteindre.
Puis jallume une cigarette en feignant de méditer sur le courage des hommes qui élèvent seuls leur progéniture.
Je constate que son enfant (fille, garçon ?) un peu chétif et mal habillé na pas de goûter
Jaimerais être son resto du cur, son secours catholique, mais... ne serait-ce pas un peu trop rentre-dedans comme approche
?
Je me mets à rêver à notre future famille recomposée au passé antérieur, dune vie en parfaite osmose avec Valérie (euh non
Julie, non euh
Vanessa, ah oui, cest ça
le paradis
!), pique-niquant près dune montagne à la campagne au bord de la mer, jouant au foot avec un ballon de basket et finissant la partie elle et moi, nus sous la neige dans la rivière faisant lamour comme des
Retour a la réalité, alerté par des cris lointains venant de mon alibi tombé du toboggan.
Tel superpapaman, ou pompier dun 11 septembre parisien, jaccoure image au ralenti- sur le lieu du drame, je prends et porte à bout de bras la victime de ce terrible et lâche attentat et me rends vers la sortie sous les applaudissements de la gente féminine largement approbatrice.
Je passe le portillon avec une agilité féline, à la recherche dune pharmacie, tout en regrettant déjà celle qui aurait pu être lhéroïne de ce fait dhiver.
Quand soudain, jentends une voix derrière mon dos :
« Vous avez du feu ? »
Je me retourne (toujours au ralenti) en lui jetant gracieusement un regard à la Clint Eastwood et un sourire Sean Pennien.
« Bien sûr... !! » réponds-je à cette damoiselle, en posant à terre le fruit tant aimé de ma chair.
Je glisse alors ma main dans ma poche, à la recherche de la flamme qui va certainement éclairer notre vie.
Jallume sa cigarette en protégeant du vent notre flamme divine de la main gauche.
Mon pouce a envie de caresser sa joue pour la retenir encore un peu car je la sens
mais ouiii
! toute émoustillée.
Elle me regarde, et me dit, « Merci Monsieur ! votre petit-fils ne sest pas fait trop mal, ça va aller ? ».
PETIT-FILS ??? NON MAIS HO !!! JAI QUE 40 ANS !!! me dis-je, soudain très vieux.
Je remballe mon briquet, prend la main de mon fils, qui, je le sens, sera privé de DVD et je file fissa vers la pharmacie
Pouffiasse !!!
↧