Tu prendras en entrée cette jolie carotte pour moitié dorange, à la fane joviale et ébouriffée, tu lui feras entendre le fibreux dune voix germée de désirs comme une appétence décérébrée et très vite tu lui demanderas de tappeler par des mots doux chambrés, ni trop chargés, ni trop glacés, un sirupeux chaud-froid façon omelette norvégienne.
Tu lappelleras mon petit bulot, ma ventouse sacrée, ma racine daubépine, mon serpolet, ma liqueur de fleur de sel, ma douce amère de cédrat aussi, quand lattente du retour de ton chibre au bercail la rendra saumâtre.
Pour le plat, en amont tu las laissée mariner, dans son jus de citron, cisaillée dans ses mauvaises herbes, esseulées face aux limaces, escargots et autres pieds de jardin. Nains fourbus de torticolis. Cest quils voient en chaque fraise un Eden pavé de graines à sucer. À force de viser la lanterne rouge, ils confondent péripétie et péripatéthique, le syndrome Pénélope pour tout atavisme.
Dans ton assiette elle instillera sa cigüe tamponnée de guimauve, elle aura préparé longuement un vin de fenouil quelle versera dans ton verre comme un reproche à livrogne. Elle tranchera dans sa propre chair un morceau de cuisse ou une aile de narine pincée, pour te faire sentir son sacrifice et combien ton absence la contrarie car en bonne femelle, elle se leurre de vouloir temprisonner dans son petit linge du quotidien, même si au fond, elle a plus envie de lidée que de sa réalité.
Elle découpera ce blanc de poulet cuit à létouffé dans la verdure sauvage, elle le poussera dans ta bouche à laide de la cuillère maternelle, un sourire de reine-mère laccompagne, elle caressera une spirale imaginaire sur son ventre de lautre main, comme on tourne la crème aigre dans la jatte avec une dose de vergeoise brune pour lamadouer.
Ne tavise pas de la prendre pour ta vache laitière, lui téter le pis à même sa fourrure persillée de pailles pour sentir un brin ta poutre se mouler, ni même lui humer le jaune parfum du foin ou le ferrugineux purin, alors quelle se croit encore volaille labellisée nourrie au grain éclaté de soleil. Assise sur son derrière gras comme un aligot auvergnat, avare cantal, elle ten réserve ses trous serrés de gruyère, sois-lui reconnaissant, cest ce quelle attend.
Passe vite sur la floculation du petit caillé, et sans tarder cours doucement la main sur sa meule et saute le fromage. Le dessert nattend pas : Enjolivé de framboises et nimbé de mascarpone glacé, tremblant de se déliter sous une fine pellicule de cacao dont le velours ourson-brun résiste, il sera bien temps de se craqueler.
Quand le tout sera bien mélangé dans la panse, ventre farci dorgasmes telluriques, tu te sentiras fatigué, voire enivré, ce sera pourtant le moment de saisir ta carotte à pleine main et de la dévorer crue.
http://www.youtube.com/watch?v=p9PiqCeLEmM
http://www.youtube.com/watch?v=eDkAARkEMoE
↧